2025, année cruciale pour l’océan ?

La troisième conférence des Nations unies sur l’océan (UNOC 3)(1) se tient du 9 au 13 juin à Nice sur le thème « Accélérer l’action et mobiliser tous les acteurs pour conserver et utiliser durablement l’océan ». Parmi les grands sujets à l’ordre du jour figurent la limitation de la surpêche, la protection de la biodiversité en haute mer, l’interdiction de l’exploitation des grands fonds (« deep-sea mining »), l’économie bleue raisonnée et le traitement de la pollution plastique. Trois événements spéciaux sont associés.

71 % de la surface de la Terre

Elément vital de notre planète, l’océan représente 90 % de sa biosphère, couvre environ 71 % de sa surface et fournit plus de la moitié de son oxygène. Il constitue également un moteur de l’activité économique, soutenant des millions d’emplois, assurant la sécurité alimentaire et soutenant le développement mondial. Mais il est particulièrement confronté aux défis planétaires actuels : dégradation de l’environnement (pollution et déchets), perte de biodiversité / épuisement de ressources naturelles et changement climatique (acidification des eaux, vagues de chaleur influant sur la température de surface, montée du niveau de la mer…) auxquels s’ajoutent les activités illicites.

Des concrétisations attendues en 2025

Ces dix dernières années, plusieurs accords et traités internationaux ont été adoptés dont beaucoup doivent être ratifiés ou mis en œuvre cette année à l’exemple du Traité sur la conservation et l’utilisation durable de la biodiversité marine en haute mer (BBNJ ou « High Seas Treaty »). Des négociations sont également en cours pour élaborer un traité international sur la pollution plastique, définir des règles sur le deep-sea mining mais aussi réduire, voire supprimer, les subventions aux activités de pêche nuisibles. En parallèle, l’Union européenne présentera le 4 juin la version finale de son Pacte pour l’Océan destiné à promouvoir une gestion durable de l’océan et assurer la résilience et la productivité des écosystèmes marins (v. encadré).

 

Le Pacte européen pour l’océan

Ce nouveau pacte doit « poser le cadre d’une approche globale des politiques liées aux océans ». L’objectif est de « mettre en place un cadre de référence unique pour toutes les actions stratégiques liées aux océans pendant le mandat de la Commission et de garantir la cohérence entre tous les domaines d’action de l’Union ayant un rapport avec l’océan. » Il s’agira de « favoriser des océans et des zones côtières résilients et en bonne santé par la promotion de l’économie bleue. » Trois objectifs sont fixés : « défendre des océans sains et productifs en mettant en œuvre la législation pertinente de l’UE et en promouvant le programme de l’Union de gouvernance internationale des océans ; stimuler une économie bleue européenne compétitive, résiliente et durable, y compris dans le secteur de la pêche ; consolider, simplifier et étendre le cadre de connaissances de l’UE sur le milieu marin. » Notons que si les ONG environnementales marines (« blue NGOs* ») ont salué mi-mai « des avancées en matière d’application des lois existantes », elles « regrettent l’absence de nouvelles actions concrètes pour répondre aux menaces les plus urgentes qui pèsent sur la vie marine et la biodiversité » (ex. : chalutage de fond dans les aires marines protégées, surpêche, pollution croissante aux micro-plastiques mais aussi manque d’engagement financier pour la protection marine).

*ClientEarth, Oceana, Surfrider Foundation Europe, Seas At Risk, BirdLife et le WWF EPO

 

 

Les priorités d’UNOC 3

UNOC 3 se fixe trois priorités : elle entend à la fois « œuvrer à l’aboutissement des processus multilatéraux liés à l’océan pour rehausser le niveau d’ambition pour la protection de l’océan ; mobiliser des financements pour l’ODD 14 et soutenir le développement d’une économie bleue durable ; et renforcer et mieux diffuser les connaissances liées aux sciences de la mer pour une meilleure prise de décision politique. »

Trois événements spéciaux associés

La conférence onusienne associera session plénière et séquences de dialogues (les « Ocean Action Panels ») du 7 au 13 juin à Nice. Mais trois événements spéciaux seront proposés en amont : le One Ocean Science Congress (du 4 au 6 juin à Nice), le Ocean Rise and Coastal Resilience Summit (le 7 juin à Nice) et le Blue Economy and Finance Forum (les 7 et 8 juin à Monaco).

. Le One Ocean Science Congress à l’initiative de l’Ifremer et du CNRS va rassembler quelque 2 000 experts du monde entier pour éclairer les décisions politiques à venir. L’idée est de proposer des recommandations concrètes pour exhorter les chefs d’Etat et de gouvernement présents à faire de l’océan une priorité dans leurs stratégies de développement durable, à soutenir les solutions basées sur la science et à accroître le financement des recherches océaniques.

. L’Ocean Rise and Coastal Resilience Summit s’adresse aux villes littorales, régions côtières et Etats insulaires menacés par l’élévation du niveau de la mer et les événements climatiques extrêmes. Organisé sur deux jours par la Ville de Nice, la plateforme Ocean & Climat et le Global Center for Climate Mobility, il devrait voir le lancement officiel de la coalition du même nom.

. Le Blue Economy and Finance Forum a pour ambition d’activer les financements en vue de restaurer la santé de l’océan et d’accélérer la transition vers une économie bleue durable et régénérative. Il est organisé par le Gouvernement Princier, la Fondation Prince Albert II de Monaco et l’Institut océanographique de Monaco.

Nouveau : une plateforme internationale pour la durabilité de l’océan

Le One Ocean Science Congress qui constituera le volet scientifique d’UNOC 3 doit aussi être l’occasion de lancer IPOS(2), une plateforme sur la connaissance de l’océan, dans l’optique de rapprocher les sciences et la politique. Les créateurs d’IPOS sont partis de deux constats : d’une part, au niveau des Nations unies, l’océan est traité par tranches (surface, bord, ressources minérales, pêche…) et encore peu sous l’angle du climat – excepté un rapport dédié du GIEC – et d’autre part, quand on parle de sciences, on se limite souvent aux sciences académiques sans associer les autres savoirs (ex. : savoirs locaux, savoir-être, etc.). Au départ envisagée comme le « GIEC de l’océan », la plateforme IPOS a progressivement évolué. Elle est devenue une plateforme offrant des services de trois types : synthèses sur un domaine particulier pour un Etat (ex. : exploitation des fonds marins) ; réponses rapides apportées aux Etats pour les appuyer dans le cadre d’un projet précis ; actions pour favoriser les idées nouvelles et/ou innovations de tout type. En bref, comme le résume François Gaill,  co-lead du projet avec Tanya Brodie Rudolph, « IPOS propose un travail de médiateur dans l’objectif de faire du lien, de faire la synthèse de toutes les connaissances qui existent sur l’océan. On est plutôt des connecteurs que des producteurs de connaissances. » IPOS travaille d’ailleurs sur l’élaboration d’une AI générative spécifique qui s’appuiera sur les meilleures références internationales.

1) Les deux premières avaient eu lieu à New York en 2017 puis à Lisbonne en 2022.

2) IPOS : International Platform for Ocean Sustainability

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