La géothermie valorise la chaleur du sous-sol à diverses profondeurs. Elle peut être utilisée pour le chauffage, le rafraîchissement, la climatisation, le stockage d’énergie, la production de vapeur mais aussi pour la production d’électricité. Energie locale, disponible, régulière, performante et propre, elle ne représente pourtant qu’une très petite part (à peine 1% au total) de la consommation finale de chaleur renouvelable en France en 2021. Face à cela, le gouvernement a adopté un plan d’action qui devrait contribuer à booster la filière.
Un des leviers pour atteindre les objectifs de 2030 et 2050
Aujourd’hui, la chaleur représente près de la moitié des consommations énergétiques en France et elle est majoritairement produite par des énergies fossiles importées, fortement émettrices de gaz à effet de serre et soumises à des variations de prix importantes. Dans le double objectif de décarbonation et de souveraineté, la géothermie a une grande part à jouer. Rappelons que d’ici 2030, les énergies renouvelables devront représenter 38% de notre consommation de chaleur et de froid (vs 22,3% en 2021) et que nous visons la neutralité carbone d’ici 2050.
Différents types de géothermie
Il existe deux types de géothermie : la géothermie de surface ou très basse énergie (< à 30°C) et la géothermie profonde basse ou moyenne énergie (entre 30° et 150°C) ou haute énergie (> à 150°C).
La géothermie de surface valorise la chaleur du proche sous-sol (moins de 200 m) à faible température (moins de 30°C) via une pompe à chaleur (PAC) géothermique couplée à des capteurs enterrés ou via des forages qui exploitent la chaleur d’aquifères superficiels. En 2021, la géothermie de surface a permis de produire 4,8 TWh de chaleur renouvelable en France métropolitaine, soit 0,7% de la consommation finale de chaleur renouvelable, avec 207 400 PAC géothermiques. La très grande majorité (94%) de ces PAC sont installées dans le secteur individuel où elles permettent de couvrir les besoins en chauffage, eau chaude sanitaire, climatisation ou rafraîchissement (ou «geocooling»).
La géothermie profonde capte une eau à plus de 30°C dans des aquifères profonds (plus de 800 m de profondeur) et permet de chauffer des ensembles de bâtiments, un quartier et/ou des sites industriels directement ou grâce à un réseau de chaleur. Les 72 installations de ce type opérationnelles en France métropolitaine produisent 2 TWh de chaleur renouvelable, soit 0,2% de la consommation finale de chaleur renouvelable. En matière de géothermie profonde, la France dispose de caractéristiques géologiques favorables avec, notamment, le bassin parisien (aquifère du Dogger) et le bassin aquitain mais aussi le bassin du sud-est, le Limagne et le fossé rhénan. Les installations sont très largement (87%) destinées au chauffage urbain via les réseaux de chaleur (entre 50° et 80°C), le reste se répartissant entre les procédés industriels, agroalimentaires ou la balnéologie (entre 30° et 180°C), la production de froid industriel (100°C) mais aussi la production d’électricité ou la cogénération (au-delà de 150°C comme à Bouillante en Guadeloupe et Soultz-sous-Forêts en Alsace).
Ainsi au total, la production de chaleur géothermique en France s’est élevée à près de 7 TWh en 2021.
Le gisement géothermique en France
La totalité du territoire français se prête à au moins une technologie de géothermie. S’agissant de la géothermie de surface, des PAC géothermiques peuvent être installées sur 99% du territoire. Concernant la géothermie profonde de moyenne énergie, outre les bassins parisiens et aquitains qui comptent respectivement 49 et 17 installations, de nombreux autres aquifères pourraient être exploités. Enfin, pour la géothermie profonde haute énergie, plusieurs zones volcaniques seraient exploitables, au-delà de celle de Bouillante en Guadeloupe (ex. : Martinique, Mayotte, Réunion) et plusieurs fossés d’effondrement autres que la vallée du Rhin pourraient aussi être exploités comme la vallée du Rhône et une partie du Massif central.
Source : Panorama de la chaleur renouvelable et de récupération – Edition 2022
Un plan d’action pour faire de la France un leader en Europe
Destiné à accélérer le déploiement de la géothermie, le plan d’action adopté par la France en février 2023 table notamment sur le doublement du nombre d’installations de PAC géothermiques chez les particuliers d’ici 2025 et une augmentation de 40% du nombre de projets de géothermie profonde lancés d’ici 2030. Il se décline en six grands axes : renforcer la capacité de forage en géothermie de surface pour répondre à la demande des secteurs résidentiels et tertiaires ; affiner le cadre réglementaire pour inciter au développement de projets de géothermie de surface ; inciter à l’installation de PAC géothermiques dans les secteurs résidentiels et tertiaires ; identifier et valoriser des aquifères profonds sous-exploités propices à la réalisation de « doublets géothermiques » pour réseaux de chaleur (dispositifs de 2 forages, dont un pour remonter l’eau et l’autre pour la réinjecter une fois exploitée) ; sensibiliser et faire monter en compétence les acteurs locaux ; susciter de nouveaux projets et encourager de nouveaux montages financiers en géothermie. Selon la ministre Agnès Pannier-Runacher, ce plan «doit permettre de produire en 15 à 20 ans suffisamment de chaleur géothermique pour économiser 100 TWh/an de gaz, soit plus que les importations de gaz russe avant 2022 ».
Géothermie et lithium : un duo prometteur
Si la géothermie est « la seule énergie renouvelable capable de produire de la chaleur, du froid, du rafraîchissement et de l’électricité avec une haute performance énergétique et une disponibilité 24 h sur 24 indépendamment des conditions climatiques et saisonnières »*, elle présente un autre atout qui prend toute son importance aujourd’hui : la géothermie profonde permet de coproduire du lithium, une ressource particulièrement recherchée dans différents domaines de la transition éco-énergétique, à l’exemple des batteries pour véhicules électriques, smartphones, ordinateurs portables… Le lithium se trouve dans l’eau géothermale prélevée lors du process. Il suffit, en plus de récupérer les calories de l’eau, de l’extraire avant la phase de réinjection de l’eau.
Plusieurs entreprises sont déjà impliquées dans cette nouvelle voie que représente le « lithium géothermal » (ou « saumure lithinifère ») : le groupe Eramet avec Electricité de Strasbourg (projet européen EUGeLi), la jeune société Geolith qui développe un procédé d’extraction spécifique (Li-Capt) s’adaptant à tout type de saumure, la startup Lithium de France, premier opérateur indépendant de chaleur et de lithium géothermal qui a levé 44 M€ en mars dernier ou encore l’Australien Vulcan avec qui Stellantis a signé fin mai un accord en vue de fournir de la chaleur renouvelable au site de Mulhouse du constructeur tout en extrayant du lithium. Notons aussi que l’Association française des professionnels de la géothermie (AFPG) compte plusieurs clusters dont un spécifique : « Alliance Lithium ».
* Panorama de la chaleur renouvelable et de récupération – Edition 2022, AFPG, CIBE, FEDENE, SER, UNICLIMA, avec l’ADEME.
À lire : Les énergies renouvelables de plus en plus compétitives en France