Quand, à l’été 2003, la ministre du Développement durable de l’époque avait indiqué que la canicule en cours préfigurait nos étés futurs à terme, beaucoup avaient souri, voire fait preuve de cynisme. Aujourd’hui, vingt ans après, les canicules et les inondations constituent deux des risques les plus importants pour les villes. Et – l’actualité récente l’a encore montré – l’heure n’est plus à rire.
Parmi les solutions possibles, la végétalisation des villes se situe à la croisée de l’atténuation et de l’adaptation. Même si elle n’est pas nouvelle, elle se structure autour de nombreux acteurs de l’amont à l’aval, évalue ses performances et compte un projet de labellisation au sein du Label Bas Carbone.
Des bénéfices à différents niveaux
La végétalisation offre un grand nombre de bénéfices : elle permet de développer la biodiversité en ville (faune, flore, micro-organismes). Elle contribue à rafraîchir la ville en période estivale. Elle apporte qualité de vie et bien-être à la population (cf. qualité de l’air grâce à la production d’oxygène, création de puits de carbone).
Elle contribue à améliorer la gestion de l’eau (cf. régulation des écoulements en cas de pluies intenses). Elle est en outre source d’emplois verts non délocalisables. Autrement dit, végétaliser la ville constitue un levier fort d’attractivité du territoire.
Des actions de plus en plus nombreuses
Certaines grandes villes communiquent sur leurs actions, à l’exemple de Lyon qui va végétaliser sa fameuse Place Bellecour en deux temps, Bordeaux qui applique son programme « Grandeur Nature » avec îlots de fraîcheur urbain, plantation de micro-forêts, désimperméabilisation des sols, fermes urbaines et jardins de pluie ou encore Paris qui va bientôt implanter sa troisième forêt urbaine (quartier du Colonel Fabien) après celles de la place de Catalogne et de Charonne, pour « lutter contre les îlots de chaleur et constituer un corridor de biodiversité ». Mais les villes d’autres tailles ne sont pas en reste dans ces démarches. Beaucoup, cependant, ont besoin d’accompagnement technique et/ou financier.
Un service numérique public d’aide à la décision pour les collectivités
C’est pour faire face à cela que la structure Plus fraîche ma ville a été créée fin mars 2023. Startup d’Etat portée par l’Ademe, elle a pour mission « d’aider les collectivités dans le choix de solutions de rafraîchissement urbain pérennes et durables ». Cela se concrétise par une plateforme qui fournit des informations précises et des exemples de projets réalisés (ex. : Lannion, Nîmes, Sète, Longvic, villes de banlieue parisienne, etc.). La collectivité intéressée choisit en fonction de l’espace sur lequel elle souhaite agir : rond-point, bâtiment, parking, rue, place, cour d’école, parc ou jardin. Elle se verra proposer les solutions les plus adaptées à son territoire et à ses spécificités.
L’axe 2 du Fonds vert
Côté soutien financier, l’axe 2 du Fonds vert (le fonds d’accélération de la transition écologique dans les territoires) est consacré à la renaturation des villes et des villages. Dans ce cadre, 500 M€ sont abondés pour « soutenir et accélérer les efforts des collectivités pour apporter de la nature dans les espaces urbains ».
Parmi les actions éligibles figurent la renaturation des sols et espaces urbains, la présence de l’eau et des milieux aquatiques dans les villes ainsi que la végétalisation des bâtiments et équipements publics. Il peut s’agir de subventions d’études de diagnostic territorial et de stratégie, de subventions d’ingénierie et études préalables à la conception des projets ou encore de subventions d’investissements permettant la mise en œuvre concrète de solutions fondées sur la nature en ville.
Une déclinaison de la méthode Bas carbone pour la végétalisation des villes
Une méthode du Label Bas Carbone destinée à valoriser le gain carbone généré par les projets de végétalisation de l’espace (dont l’accroissement du couvert arboré) est en consultation en septembre 2023. Cette méthode est applicable « exclusivement sur le territoire de la France métropolitaine, aux projets situés en ville (au sens de l’unité urbaine : espace à fort degré d’anthropisation caractérisé par une zone de bâti continu comptant au minimum 2 000 habitants) ».
Les projets éligibles sont donc situés dans les communes de type « unité urbaine » définie par l’Insee. Cette méthode dite « Ville arborée » est développée par la Société Forestière de la Caisse des Dépôts.
Vers une obligation de végétaliser les villes ?
Le rapport du PNUE(1) « Matériaux de construction et climat : construire un nouvel avenir » paru le 12 septembre 2023 appelle à rendre obligatoire la végétalisation des villes par le biais de la législation. Un grand nombre d’acteurs de la filière semblent déjà prêts…
Un référentiel d’évaluation pour la végétalisation du bâti
Qu’il s’agisse de toitures ou de façades, la végétalisation des bâtiments apporte les mêmes bénéfices que la végétalisation globale des villes (support de biodiversité, rétention des eaux pluviales, amélioration du confort d’été grâce à l’évapotranspiration des plantes, absorption des rayons solaires et donc de la chaleur…). Et elle contribue à protéger le bâti (étanchéité, corrosion due à la pollution…).
Selon l’Association des toitures et façades végétales (Adivet)*, le marché en France des toitures végétalisées est estimé à 1,6 million de m² installés par an et celui des façades, à 10 000 m² installés par an. L’association a lancé au printemps 2023 le GreenRoofScore, un référentiel d’évaluation des performances des toitures et terrasses végétalisées en termes de services écosystémiques.
La surface végétalisée du projet en toiture et terrasse doit avoir une superficie minimale de 50 m² ou constituer au moins 30 % de la surface végétalisable. Les projets peuvent porter sur des travaux neufs ou de rénovation.
1) PNUE : Programme des Nations unies pour l’environnement (ou ONU Environnement)
- ‘La rue commune, guide méthodologique pour la transformation des rues ordinaires’, Richez Associés, Franck Boutté Consultants, Léonard (VINCI Group), March 2023, 400 pages, downloadable from
- * « Enquête sur le bâti végétalisé en France en 2021 », Observatoire Végétalisation des bâtiments, BatiEtude et Adivet, 62 pages, téléchargeable sur https://www.adivet.net/ressources/bibliographie