Aujourd’hui, la chaleur représente près de la moitié de la consommation finale d’énergie en France. Mais elle repose encore largement sur le fossile. À fin 2018, la part de la chaleur consommée d’origine renouvelable s’élève à 19,9% alors que l’objectif fixé pour 2030 par la loi TECV est de 38%. Au-delà du bois-énergie, du solaire thermique, des PAC aérothermiques et autres solutions de chaleur renouvelable, les réseaux de chaleur et de froid ont leur rôle à jouer. D’ailleurs, la loi impose aussi de multiplier par cinq la quantité de chaleur et de froid renouvelable distribuée par les réseaux à cette même échéance. Où en est-on aujourd’hui ?

Un réseau de chaleur est un système de distribution de chaleur produite de façon centralisée permettant de desservir plusieurs usagers. Il comprend une ou plusieurs unités de production de chaleur, un réseau de distribution primaire (avec fluide caloporteur) et un ensemble de sous-stations d’échange avec réseau de distribution secondaire pour desservir les bâtiments.

Sur le même principe, un réseau de froid permet de couvrir les besoins en froid des bâtiments raccordés à l’échelle d’un site, d’un quartier, voire d’une ville. Il comprend une centrale de production (centrale frigorifique) qui produit de l’eau glacée, un réseau primaire, une unité de livraison (sous-station) et un réseau secondaire. Les installations utilisent un groupe froid à compression ou un groupe froid à absorption, celui-ci nécessitant une source chaude qui peut être une EnR&R. D’autres systèmes peuvent être utilisés comme le free cooling (système de refroidissement naturel)(1) ou la thermofrigopompe, système hybride utilisable aussi bien pour produire du froid que du chaud.

Une mutualisation des besoins de confort thermique

En 2018, la grande majorité (87%) des 781 réseaux de chaleur en exploitation en France alimente des bâtiments résidentiels et tertiaires, le reste (13%) se répartissant entre industrie, agriculture et réseaux interconnectés. Ces réseaux ont livré au total 25,4 TWh à plus de 40 000 bâtiments raccordés. Quant aux 23 réseaux de froid, ils répondent principalement aux besoins de froid de bâtiments tertiaires tels que bureaux, hôtels, aéroports et hôpitaux. Ils ont livré 1,05 TWh en 2018 à quelque 1380 bâtiments.

Une part accrue des EnR&R

Même si leur production globale est restée relativement stable(2), les réseaux de chaleur ont plus que doublé  leur alimentation en EnR&R en dix ans, celle-ci étant passée de 27% en 2009 à 57,1% en 2018 (avec 14,1 TWh sur les 25,4 livrés). Qui plus est, les énergies mobilisées sont des énergies disponibles localement, à l’exemple de l’énergie issue des UVE (25%), de la biomasse (22%) ou de la géothermie (5%). Grâce à cela, le contenu en CO2 des réseaux a chuté de 45% depuis 2006, passant de près de 210 g/kWh à 116 g/kWh. Selon le SNCU(3), ce contenu moyen rend les réseaux de chaleur « moins émissifs de 36% par rapport à l’électricité (180 g/kWh), de 50% par rapport au gaz naturel (234 g/kWh) et de 61% par rapport au fuel domestique (300 g/kWh) ». Les réseaux se classent ainsi au deuxième rang derrière la biomasse (13 g/kWh).

Cependant, ces bons chiffres de « verdissement » (14,1 TWh sur les 25,4 TWh livrés) ne doivent pas masquer le fait qu’ils sont encore loin des objectifs fixés. De fait, la PPE prévoit 24,4 TWh assurés par les EnR&R pour 2023 (sur une production totale estimée à 41 TWh) et la TECV table sur 39,5 TWh dès 2030 (sur une production totale estimée à 61 TWh).

25 actions pour accélérer le déploiement

Plus largement, la filière doit encore se développer en France, que ce soit en création ou en extension. C’est dans cette optique que le MTES a mis en place début 2019 un groupe de travail chargé d’identifier et lever les freins existants. Vingt-cinq actions ont été retenues autour de cinq objectifs clés : accroître la mobilisation et l’attractivité des réseaux, améliorer l’information et la protection des consommateurs, renforcer la compétitivité économique des réseaux, contribuer au verdissement de l’énergie livrée par les réseaux, valoriser l’innovation et investir dans la R&D.

Ainsi, par exemple, des actions de communication et de sensibilisation devraient être menées de même que des opérations visant à convaincre les collectivités de plus de 10 000 habitants. Les modalités liées au Fonds Chaleur devraient évoluer (ex. : possibilité de prétendre aux CEE pour les réseaux aidés par le Fonds, ce qui, jusqu’alors, était non cumulable). En matière de « verdissement », les critères d’éligibilité à la TVA à 5,5% pourraient être revus (jusqu’à 60% d’EnR&R vs 50% aujourd’hui). Notons par ailleurs que le Sénat a proposé fin novembre d’appliquer ce taux réduit également aux réseaux de froid.

D’autres actions prévoient de faciliter la récupération de chaleur fatale industrielle, d’inciter à renoncer au charbon (qui représente encore aujourd’hui 4,4% du mix des réseaux), de favoriser la géothermie dans les régions où le gisement est important. Les collectivités pourraient se voir autorisées à inciter, voire obliger, au raccordement des bâtiments neufs situés à proximité d’un réseau. Enfin, des appels à projets de R&D devraient être lancés, en particulier en matière d’outils numériques de pilotage. Et l’accent devrait être mis sur l’innovation et sur la formation.

 

EN SAVOIR PLUS


« Les chiffres clés 2018 des réseaux de chaleur et de froid », Enquête annuelle réalisée par le SNCU avec Amorce.

 

 

1) Ce refroidissement naturel peut être assuré par un cours d’eau (ex. : la Seine à Paris) ou la mer (ex. : la Méditerranée à Marseille).

2) Elle était de 23,4 TWh en 2012.

3) SNCU : Syndicat national du chauffage urbain et de la climatisation urbaine. Le SNCU est membre de la Fedene : Fédération des services énergie environnement.

 

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