Le 11 décembre 2019, la Commission européenne présentait le Pacte vert pour l’Europe, sa feuille de route pour rendre l’Europe neutre sur le plan climatique d’ici 2050, stimuler l’économie grâce aux technologies vertes, créer une industrie et des transports durables et réduire la pollution. Depuis, plusieurs stratégies et plans d’action ont été adoptés, le tout dans le contexte de relance de l’économie.
Le plan d’action défini dans ce Green Deal vise à promouvoir l’utilisation efficace des ressources en passant à une économie propre et circulaire, à restaurer la biodiversité et à réduire la pollution. Il concerne de fait l’ensemble des secteurs économiques : industrie, transports, énergie, bâtiment, agriculture…
L’industrie en ligne de mire
Premier jalon important : la Stratégie industrielle pour l’Europe adoptée en mars 2020 pour aider l’industrie européenne à mener sa double transition écologique et numérique et à devenir plus compétitive. Lancée la veille même de la déclaration de pandémie mondiale par l’OMS, cette stratégie a été mise à jour en mai dernier pour tirer les conséquences de la crise sanitaire. Cette nouvelle version doit contribuer à renforcer la résilience du marché unique, gérer les dépendances stratégiques de l’Union(1) et accélérer la double transition. Ceci passera par de nouvelles alliances à l’image de l’Alliance pour les batteries lancée en 2017 et de nouveaux partenariats comme ceux lancés mi-juin avec l’industrie pour la période 2021-2030 et représentant des engagements de financement de près de 22 milliards d’euros (v. encadré).
22 Mrd € investis dans 11 partenariats avec l’industrie
Pour « faire de l’Europe la première économie neutre pour le climat », la Commission a lancé 11 nouveaux partenariats de coopération avec l’industrie. Au moins sept d’entre eux ont trait à la transition écologique : neutralité des industries de transformation (‘Processes4Planet’), fabrication d’acier à faible intensité carbone, transport routier à émissions nulles (‘2ZERO’), développement d’une chaîne de valeur industrielle compétitive pour les batteries, transport par voie d’eau à émissions nulles, environnement bâti durable centré sur les personnes (‘Built4People’) mais aussi développement d’une primauté européenne en matière de fabrication durable basée sur l’économie circulaire, la transformation numérique et une production neutre en carbone (‘Made in Europe’). Lancés le 14 juin dernier, ces partenariats coprogrammés complètent les 10 nouveaux partenariats européens institutionnalisés (i.e. associant UE, Etats membres et/ou industrie) annoncés en février et qui mobiliseront près de 10 Mrd €.
L’adoption de la stratégie industrielle a été suivie en mars 2020 par la proposition d’un Plan d’action en faveur de l’économie circulaire axé sur l’utilisation durable des ressources. Destiné notamment à « faire en sorte que les produits ‘durables’ deviennent la norme en UE », ce plan met l’accent sur les secteurs les plus utilisateurs de ressources (matériel électronique et TIC, batteries & véhicules, emballages, matières plastiques, textiles, construction & bâtiment, produits alimentaires) et garantit une réduction de la production de déchets.
La Commission a ensuite présenté la Stratégie de l’UE en faveur de la biodiversité à l’horizon 2030 et sa stratégie « De la ferme à la table » (mai 2020), l’objectif majeur étant d’enrayer l’érosion de la biodiversité et de l’inverser en transformant notre système alimentaire, notre utilisation des forêts, terres, cours d’eau et mers et en transformant nos systèmes énergétiques, urbains et industriels. Et elle a adopté en juillet une Stratégie pour l’intégration du système énergétique et pour l’hydrogène, visant à favoriser l’efficacité énergétique, à rendre le système énergétique plus circulaire et à développer l’électrification directe et les combustibles plus propres. Des objectifs ambitieux ont été fixés en matière d’hydrogène renouvelable (ex. : passer à 6 GW d’électrolyseurs pour hydrogène d’ici 2024 et jusqu’à 40 en 2030).
Plusieurs autres stratégies spécifiques ont été présentées à l’automne 2020 : Stratégie pour une vague de rénovations (cf. doubler leur taux pour réduire les émissions, stimuler la reprise et faire reculer la précarité) ; Stratégie relative au méthane (celui-ci, essentiellement issu de l’industrie, de l’agriculture et du secteur des déchets, constitue à la fois un GES puissant et un polluant majeur) et Stratégie pour la durabilité relative aux produits chimiques (cf. objectif d’un ‘environnement exempt de substances toxiques’ : pesticides, biocides, produits pharmaceutiques mais aussi les métaux lourds, plastifiants et retardateurs de flamme), dans un double souci de protection de la santé et de l’environnement.
Et au printemps 2021, un Plan d’actions pour la production biologique visant notamment à passer à 25 % des terres agricoles de l’UE en bio d’ici 2030 a été adopté de même qu’un Plan d’action « zéro pollution » destiné à supprimer la pollution dans l’air, l’eau et les sols via l’augmentation des normes de qualité, la réduction de la pollution des sols et leur réhabilitation ou encore la révision de la législation européenne des déchets.
Climat : une ambition revue à la hausse…
Après avoir relevé son ambition climatique dans le cadre d’un plan cible spécifique publié dès septembre 2020 (cf. – 55 % d’émissions de GES d’ici 2030 par rapport à 1990 ; actions dans tous les secteurs, etc.), la Commission a dévoilé en novembre sa Stratégie pour les énergies renouvelables en mer avec là-encore des objectifs ambitieux : passer de 12 GW installés à 60 GW en 2030 et 300 GW d’ici 2050 pour l’éolien en mer et à 40 GW installés en énergie houlomotrice et marémotrice. Elle a également proposé de moderniser le cadre réglementaire relatif aux batteries afin de garantir que toutes celles mises sur le marché au sein de l’UE soient « durables, performantes et sûres tout au long de leur cycle de vie ».
… en attendant la loi européenne sur le climat
Après la présentation du Plan cible à l’horizon 2030 (v. ci-dessus) et du Pacte européen pour le climat (décembre 2020), le Parlement et le Conseil étaient parvenus à un accord provisoire concernant la loi européenne sur le climat le 21 avril dernier. Le texte a été adopté par le Parlement le 24 juin (cf. objectifs de réduction des émissions à 57 % pour 2030 par rapport aux niveaux de 1990 puis de neutralité d’ici 2050, objectifs qui deviendront juridiquement contraignants). Il doit encore être adopté par le Conseil et le règlement entrera en vigueur vingt jours après sa publication au JOCE. Rappelons que, à ce jour, les émissions européennes ont diminué de 23 % par rapport à celles de 1990.
Et maintenant ?
La Commission européenne présentera son paquet « Ajustement à l’objectif 55 » (« Fit for 55 ») le 14 juillet prochain. Cet ensemble de réformes « fondé sur l’intégrité environnementale et la solidarité » envisage notamment un élargissement du système d’échanges de quotas d’émissions à l’aérien et au maritime et l’introduction d’une taxe carbone pour tous les produits fabriqués hors UE et devrait renforcer certaines normes déjà existantes. Ce paquet sera ensuite discuté avec le Conseil et le Parlement. A suivre.
Pacte vert et plan de relance
Véritable « volet investissement du Pacte vert », le Plan d’investissement(2) prévu mobilisera 1000 milliards d’euros au cours de la prochaine décennie (dont budget de l’UE : 503 Mrd ; fonds InvestEU : 279 Mrd ; mécanisme pour une transition juste : au moins 100 Mrd). Le Pacte vert est également la « ligne de conduite » de la Commission pour sortir de la pandémie : un tiers des 1800 milliards d’euros d’investissements du plan de relance NextGenerationEU et le budget septennal de l’UE serviront à le financer.
1) S’agissant des dépendances de l’UE, 137 produits ont été identifiés dont 34 plus vulnérables : matières premières, batteries, principes actifs pharmaceutiques, hydrogène, semi-conducteurs et ‘technologies en nuage et de périphérie’ (‘cloud & edge computing’).
2) Cf. « Plan d’investissement du Pacte vert pour l’Europe », Communication de la Commission européenne du 14.01.2020.
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