Si la qualité de l’air s’est améliorée en Europe ces dernières décennies, la pollution de l’air reste le principal risque environnemental pour la santé. La Commission européenne a proposé fin 2022 une révision des règles de l’UE dans ce domaine assortie d’objectifs plus ambitieux à horizon 2030, l’idée étant d’atteindre l’objectif « Zéro Pollution » d’ici 2050. Le texte a été adopté par le Parlement le 24 avril et doit maintenant être adopté par le Conseil de l’UE(1).

Selon l’Agence européenne pour l’environnement (EEA), la qualité de l’air en Europe continue de s’améliorer mais dans de nombreuses régions, et en particulier dans les villes, la pollution reste supérieure aux niveaux de sécurité recommandés. En 2022, la quasi-totalité (96%) des Européens vivant en milieu urbain étaient exposés à des concentrations de particules fines (PM2,5) supérieures au niveau de 5 µg/m³ fixé par les lignes directrices annuelles de l’OMS pour 2021 et à des concentrations d’ozone supérieures au niveau de 100 µg/m³ fixé par les lignes directrices à court terme(2). Sur 27 pays, seule l’Islande présentait des concentrations de particules inférieures au niveau recommandé par l’OMS.

D’une manière générale, la pollution de l’air est la cause de 300 000 décès prématurés par an et de plusieurs types de maladies chroniques en UE. Le plan d’action « Zéro Pollution » du Pacte vert européen fixe comme objectif pour 2030 de réduire les décès prématurés causés par les particules fines d’au moins 55 % par rapport aux niveaux de 2005 et comme objectif à long terme de ne plus avoir d’impact significatif sur la santé d’ici 2050.

De nouvelles règles adoptées fin avril

La loi adoptée le 24 avril par le Parlement européen fixe des limites et des valeurs cibles plus strictes à l’horizon 2030 pour les polluants ayant les conséquences les plus graves sur la santé humaine, notamment les particules fines (PM2,5, PM10), le dioxyde d’azote  (NO2) et le dioxyde de soufre (SO2). Elle stipule également que « de plus nombreux points d’échantillonnage de la qualité de l’air seront  mis en place dans les villes », afin de rendre les indices de qualité de l’air « plus facilement comparables, clairs et accessibles au public ».

Autre point notable, « en cas de violation des règles nationales, les personnes affectées par la pollution de l’air pourront intenter une action en justice et les citoyens auront droit à une indemnisation si leur santé a été dégradée ».

Enfin la loi prévoit que les Etats membres « peuvent demander un report de l’échéance de 2030 à dix ans supplémentaires au maximum, si des conditions spécifiques sont remplies ».

Cependant, si la proposition de révision des directives visait en particulier à mieux aligner les normes de qualité de l’air de l’UE sur les recommandations de l’OMS, l’EEA indique que les normes adoptées en février 2024 restent moins strictes pour tous les polluants que celles définies par l’OMS.

 

L’impact d’une exposition prolongée à de multiples polluants désormais étudié


Alors que jusque-là, les recherches portaient surtout sur les effets sanitaires des polluants atmosphériques individuels, on commence à étudier les conséquences sur la santé d’une exposition prolongée et d’une exposition à des polluants multiples. Par exemple une étude du service de recherches du Parlement européen (EPRS) publiée fin mai examine l’impact d’une exposition prolongée à de multiples polluants en se focalisant sur les zones géographiques dotées de grandes installations industrielles ayant un passé atmosphérique comme la vallée de la Ruhr en Allemagne et Tarente en Italie. Elle propose quatre options politiques concrètes : accroître la prise en compte des effets sur la santé dans la législation relative à la pollution atmosphérique ; réduire les émissions de polluants atmosphériques en Europe ; réduire les concentrations de polluants atmosphériques en Europe ; réduire la demande d’énergie, de transport et d’élevage. Il reste à espérer que ce rapport, qui va bien au-delà de la seule obligation de mesurer communément préconisée mais sans qu’une suite ne soit donnée, soit lu et pris en compte. Car la vraie question est celle de la réduction des émissions et des concentrations.

 

En France, quatre appels à projets spécifiques

L’Ademe renouvelle en 2024 ses appels à projets relatifs à la qualité de l’air AACT-Air, AgriQAir, Fonds Air Bois et AQACIA. AACT-Air porte sur les aides aux études pour les collectivités, AgriQAir, sur les aides à l’expérimentation, l’évaluation et la diffusion des solutions efficaces pour réduire les émissions d’ammoniac (NH3) et de particules (PM2,5 et PM10) dans le secteur agricole, et Fonds Air Bois sur les aides aux collectivités pour accompagner le renouvellement accéléré des appareils de chauffage domestique au bois peu performants dans le but de réduire les émissions de particules fines, (en particulier les PM2,5). AQACIA (Amélioration de la qualité de l’air : Comprendre, innover, agir) concerne quant à lui les projets de recherches.

Ces appels à projets s’inscrivent dans le deuxième Plan national de réduction des émissions des polluants atmosphériques (PREPA), pour la période 2022-2025. Ils visent à « anticiper et accompagner la mise en œuvre des politiques publiques en matière d’amélioration de la qualité de l’air en complémentarité avec d’autres fonds comme les feuilles de route Qualité de l’air pour les territoires en contentieux également gérées par l’Ademe ou le fonds vert ZFE géré par les services de l’Etat ».

Vers une approche intégrée Air Santé Climat Energie ?

Lors de son assemblée générale le 23 mai dernier, Atmo France(3) a rappelé les liens étroits entre pollution de l’air et changement climatique. Sa présidente, Catherine Hervieu, indique que « réduire les activités polluantes induit également une réduction de nos émissions de GES », mais que, « en parallèle, les actions menées en faveur de la protection du climat peuvent dégrader la qualité de l’air extérieur et intérieur si elles ne font pas l’objet de dispositions particulières ». Un exemple emblématique en est la rénovation thermique : si elle permet de réduire les consommations énergétiques et donc de réduire les émissions de GES, elle doit s’accompagner d’une attention particulière aux enjeux de la qualité de l’air intérieur pour éviter de le dégrader en cas de mauvaise ventilation ou d’absence de ventilation. Autre exemple, l’utilisation de bois-énergie qui est favorable à la maîtrise des émissions de GES mais peut entraîner des rejets importants de polluants à fort impact sur la santé. Tout cela plaide pour « une approche intégrée de ces problématiques dans les différentes politiques ». Mais, pour Atmo France, ce n’est pas encore véritablement le cas…

 

1) La loi pourra alors être publiée au Journal officiel de l’UE et entrer en vigueur vingt jours plus tard. Les Etats membres auront alors deux ans pour appliquer les nouvelles règles.

2) Pour mémoire, les particules sont principalement issues de la combustion de fossiles dans le chauffage domestique, le transport routier et les activités industrielles.

3) Fédération des associations agréées de surveillance de la qualité de l’air, Atmo France regroupe 18 associations régionales (AASQA) qui travaillent avec plus de 720 stations de mesure fixes et mobiles réparties sur l’ensemble du territoire.

À lire : Surveillance de la qualité de l’air intérieur : Un nouveau dispositif en 2023   

 

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