La transition vers une économie plus sobre et moins impactante voit l’apparition de risques spécifiques. C’est le cas dans les différents domaines de l’énergie. Quels sont ces risques ? Et comment sont-ils gérés ?

 

Quels types de risques ?

D’une manière globale, les risques liés à la transition écologique couvrent à la fois des risques nouveaux et des risques déjà existants mais qui évoluent en parallèle aux technologies (ex. : batteries lithium-ion, hydrogène, nanotechnologies dont les nanopesticides, nanoparticules…). Ces risques sont souvent complexes, ils peuvent s’interconnecter et leur impact peut être particulièrement grave sur la santé et l’environnement. Ils se multiplient par le simple fait que l’exposition augmente (par exemple, nous utilisons toujours plus de batteries dans notre quotidien).

Dans le secteur de l’énergie, les risques concernent différents domaines parmi lesquels les énergies nouvelles, le stockage ou encore la conversion d’anciennes mines.

 

Les risques liés aux énergies nouvelles

Au sein des nouvelles énergies et des nouveaux vecteurs énergétiques, l’hydrogène décarboné tend à se développer en tant que brique essentielle de la transition énergétique. Selon les projections, si tous les objectifs fixés pour 2030 (véhicules, stations d’approvisionnement, batteries, stockage, transport…) étaient atteints, le volume global d’hydrogène consommé pourrait se trouver multiplié par six. Mais aujourd’hui, chaque maillon de la filière présente une part de risques potentiels, ce qui rend difficile la maîtrise des risques au niveau de la filière même. En parallèle, la filière connaît une décentralisation de sa production au plus près des usages. Enfin, en tant que filière en émergence, l’hydrogène décarboné fait progressivement l’objet de nouvelles réglementations.

L’hydrogène, un gaz inflammable aux risques particuliers

L’hydrogène (ou plutôt le dihydrogène) est léger, inodore, incolore, non toxique, non corrosif et offre une forte densité énergétique. Mais sa plage d’explosivité tout comme sa vitesse de combustion sont élevées, ses flammes sont peu visibles et il peut fragiliser son environnement selon les métaux utilisés. La question principale liée à l’hydrogène est celle des fuites. Selon une analyse menée par l’Inéris, sur 213 accidents relevés, pas moins de 84 % se caractérisaient par des incendies ou des explosions, le reste (16%) relevant de fuites d’hydrogène non enflammé. Autre chiffre significatif, plus de 70 % des accidents sont d’origine organisationnelle ou humaine. Selon l’Inéris, si les risques associés sont connus et maîtrisés depuis des décennies dans l’industrie, la forte croissance de systèmes à hydrogène mis en œuvre dans d’autres secteurs peut être le fait d’acteurs nouveaux parfois peu familiers avec cette molécule. C’est pourquoi l’institut s’est positionné dans l’accompagnement de la filière sur le plan de la maîtrise des risques. Il a d’ailleurs été audité fin 2023 en vue d’une qualification pour la nouvelle certification IECEx OD 290 dédiée aux systèmes exploitant l’hydrogène. Cette certification IECEx(1) offre un cadre global pour les équipements, les installations de réparation et les compétences personnelles dans le domaine.

D’autres énergies nouvelles ou à nouveau explorées

Les autres énergies nouvelles peuvent présenter des risques spécifiques. C’est le cas par exemple de la géothermie profonde et de l’ammoniac carburant maritime.

La géothermie profonde

La géothermie profonde(2) connaît un renouveau aujourd’hui, près de 40 ans après le lancement d’opérations comme Soultz-sous-Forêt, site pilote en Alsace depuis 1987 ou Bouillante en Guadeloupe où une centrale électrique à deux unités fonctionne depuis 1986. Aujourd’hui, de nombreuses installations sont en fonctionnement dans les bassins aquitain et parisien, le fossé rhénan, le couloir rhodanien et bressan, la Limagne et le Hainaut. Mais la géothermie profonde peut avoir un corollaire important : la sismicité induite par les opérations, d’où un travail sur les moyens pour la réduire. La maîtrise des risques est d’autant plus nécessaire que de nombreux projets voient le jour en vue de coproduire du lithium et de la géothermie sur les mêmes sites, le lithium étant présent dans les saumures géothermales.

L’ammoniac carburant maritime

Face à la part du transport maritime dans le changement climatique (3 % des émissions mondiales de GES) et à l’accroissement continu de ce mode de transport, l’Organisation maritime internationale (OMI) a élaboré une stratégie sur les GES dans laquelle elle préconise plusieurs combustibles de substitution comme l’électricité, les biocarburants, l’hydrogène, le méthanol, le vent mais aussi l’ammoniac. Mélange d’azote et d’hydrogène (NH3), l’ammoniac est facile à stocker, il a une densité énergétique deux fois plus élevée que l’hydrogène et il peut être brûlé directement dans un moteur à combustion interne et/ou transformé en hydrogène pour produire de l’électricité utilisable dans un moteur. Cependant, il présente une température d’auto-inflammation élevée et des limites d’explosivité restreintes, d’où la nécessité de le combiner avec un combustible secondaire.

 

Les risques liés au stockage d’énergie

Elément indissociable des énergies nouvelles, le stockage d’énergie est déterminant pour la viabilité de la filière. Il comprend le stockage d’électricité (stationnaire ou embarqué) et le stockage thermique (pour le chauffage et la climatisation). S’agissant du stockage d’électricité, les possibilités sont multiples : stockage mécanique (par station de pompage, par air comprimé ou par inertie), stockage électrochimique (par batteries lithium-ion, sodium, sodium-ion, à flux…) et stockage chimique (par production d’hydrogène via l’électrolyse de l’eau). Certains risques peuvent être associés à ces différents types de stockage auxquels s’ajoutent le stockage souterrain d’hydrogène et le captage / stockage de carbone (CCS), tous deux pouvant aussi poser certains problèmes de sécurité.

Les risques liés au stockage par batteries

Concernant les batteries lithium-ion stationnaires, des limites sont apparues dans certains dispositifs de maîtrise des risques intégrés dans des conteneurs de stockage batterie (ex. : dispositif d’extinction qui ne s’est pas déclenché, absence d’évent, etc.). S’agissant des batteries plomb à recombinaison (VRLA) utilisées notamment pour la production d’EnR, des risques de défaut en fonctionnement ont pu être constatés, induisant notamment l’obligation d’installer une ventilation à l’emplacement même de la batterie. Enfin, si les batteries Red-ox Flow (batteries à circulation électrochimique à flux Red-ox) sont par nature aqueuse, donc peu sujettes au risque incendie ou électrique, elles peuvent provoquer un risque chimique du fait des substances toxiques qu’elles contiennent : la circulation de liquides peut aboutir à des fuites de liquides corrosifs acides ou à des mélanges incompatibles produisant des gaz toxiques.

Les risques liés au captage et stockage de carbone (CCS)

Le captage / stockage de carbone induit des opérations de transport et d’injection de CO2, d’où plusieurs types de risques comme ceux liés à la présence d’impuretés, à une variabilité des concentrations ou aux viscosités. L’Inéris travaille actuellement sur cette question avec plusieurs partenaires industriels et académiques (cf. « boucle de simulation de processus comme le remplissage et la vidange »).

 

Les risques liés à la post-exploitation des mines et des énergies fossiles

Après l’arrêt d’une exploitation, certains risques et impacts demeurent comme le risque micro-sismique dans les anciennes mines ou encore les risques liés aux anciens puits d’hydrocarbures (ex. : remontée de gaz ou d’huile en surface, contamination d’aquifères par de la saumure ou des hydrocarbures, mouvement de terrain…). Ceci pose des enjeux de sécurité lors de la réutilisation de sites en lien avec la transition énergétique (ex. : site d’extraction du lithium sous une carrière de kaolin à Beauvoir dans l’Allier)(3) ou lors de la reconversion d’ouvrages souterrains. A cet égard, le BRGM et l’Inéris mènent actuellement une évaluation des risques associés à la reconversion des puits d’hydrocarbures en puits géothermiques.

 

1) IECEx : International Electrotechnical Commission System for Certification to Standards Relating to Equipment for Use in Explosive Atmospheres.

2) La géothermie profonde consiste à capter par forage l’eau des aquifères profonds (entre – 200 m et – 2 500 m) puis à la transférer à des réseaux de chaleur pour assurer le confort thermique. L’objectif fixé pour 2028 est de produire 4 TWh en France. Pour soutenir ce développement, l’Inéris et le BRGM ont publié en 2023 un « Guide de bonnes pratiques pour la maîtrise de le sismicité induite par les opérations de géothermie profonde ».

3) Le projet Emili de mine de lithium porté par Imerys a été reconnu « Projet d’intérêt général majeur » par le gouvernement début juillet 2024, ce qui devrait faciliter certaines des nombreuses démarches administratives nécessaires. Le projet comprend plusieurs sites : la mine et l’usine de concentration à Echassières, l’atelier de chargement à la Fonchambert et l’usine de conversion près de Montluçon. La production prévue de 34 000 tonnes d’hydroxyde de lithium par an doit permettre d’équiper près de 700 000 véhicules électriques par an. (Emili : Exploitation de MIca Lithinifère par Imerys).

 

 

 

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