Le Service de la donnée et des études statistiques du CGDD a publié mi-mai les premiers résultats de son analyse des éco-activités et de l’emploi environnemental en France pour l’année 2016. Sont désignées ici comme éco-activités les « activités qui produisent des biens ou services ayant pour finalité la protection de l’environnement ou la gestion des ressources »*.
En 2016, les éco-activités ont mobilisé 456 050 emplois en équivalent temps plein (ETP), soit 1,8% de l’emploi intérieur total français. Restés stables depuis 2011, période où la production environnementale est entrée en stagnation, les effectifs ont enregistré une très légère augmentation (+ 0,5%) entre 2015 et 2016, essentiellement dans la protection et la restauration des sols et masses d’eau, domaine marqué par l’essor de l’agriculture biologique (+ 11,7% d’agriculteurs engagés).
Les deux grands secteurs traditionnellement pourvoyeurs d’emplois – eaux usées et déchets – ont perdu respectivement 1600 et 2 550 ETP. Dans l’eau, après les importants investissements de mise aux normes réalisés de 2005 à 2013 qui ont abouti à un taux de conformité de plus de 90% des STEP, les exigences d’investissements se sont fortement réduites. De même dans les déchets, alors que la mise en place de la collecte sélective et l’investissement dans les usines de traitement avaient généré des hausses d’emploi jusqu’à 2011, les investissements ne progressent plus et la tendance est à la rationalisation de la gestion de la collecte sélective.
De son côté, le secteur de la récupération a perdu 2 350 emplois (soit – 10,4% par rapport à 2015) en raison de « ventes moins lucratives de matières premières secondaires ».
Enfin, le domaine des EnR dans son ensemble (hydraulique, biomasse, éolien, solaire…) voit ses effectifs augmenter très légèrement (+ 1% par rapport à 2015). Mais ceci masque des réalités différentes. Par exemple, l’éolien gagne 1200 ETP tandis que le photovoltaïque en perd tout autant. Cette forte réduction dans le PV serait notamment liée à l’effacement du marché des petites installations résidentielles (jusqu’à 9 kW) au profit de grandes installations qui nécessitent moins d’emplois, le rapport étant évalué de 18 à 4. Le plan de libération des énergies renouvelables récemment lancé par le ministère vise à re-balayer ces tendances. Dans ce cadre, le groupe de travail ‘solaire’ a souligné le potentiel de l’autoconsommation individuelle et collective, des technologies de stockage ou encore du solaire thermique en plein renouveau (cf. projets toujours plus compétitifs, baisses de prix…). Des groupes de travail similaires avaient déjà rendu leurs conclusions sur l’éolien et la méthanisation.
Par ailleurs, à travers la nouvelle feuille de route dédiée, l’économie circulaire mobilise particulièrement les collectivités et les entreprises. La création de nouvelles filières de recyclage, la recomposition des filières REP (Responsabilité Elargie du Producteur) et un engagement structuré pour des pratiques de réparation et de réemploi constituent autant de pistes d’actions concrètes et opérationnelles qui auront un impact véritable en termes d’emplois. Déjà en 2015, le cabinet McKinsey & Company avait chiffré à 1800 milliards d’euros d’ici 2030 les bénéfices à l’échelle européenne de l’adoption de modèles économiques circulaires impulsés par les pouvoirs publics avec, à la clé, création d’emplois, évolution des compétences et accompagnement à la formation initiale et professionnelle.
L’ÉCONOMIE « VERTE » CRÉATRICE D’EMPLOIS À L’ÉCHELLE MONDIALE
Dans un rapport publié en mai dernier*, l’OIT indique que, même si la transition vers une économie « verte » va entraîner des pertes d’emplois à hauteur de 6 millions à l’échelle mondiale d’ici 2030, elle devrait permettre la création de 24 millions d’emplois « si des politiques permettant de promouvoir une économie plus respectueuse de l’environnement sont mises en place ».
Les créations devraient se faire essentiellement dans les régions du monde qui prennent des mesures en matière de production et de consommation (Amériques, Asie, Pacifique, Europe). En revanche, les régions encore très dépendantes des énergies fossiles et des mines comme l’Afrique et le Moyen-Orient pourraient connaître des pertes d’emplois si les tendances actuelles se poursuivent.
Selon l’OIT, la création nette d’emplois concerne la plupart des 163 secteurs économiques analysés. Seuls 14 d’entre eux devraient subir des suppressions supérieures à 10 000 postes, dont deux – extraction pétrolière et raffinage – au-delà du million d’emplois. Si la production d’électricité basée sur les fossiles devrait perdre 400 000 emplois, l’électricité générée à partir d’EnR pourrait en gagner 2,5 millions. Par ailleurs, l’orientation vers une économie circulaire pourrait se traduire par la création de 6 millions d’emplois. Enfin, le rapport souligne également le fort potentiel lié à l’adoption de pratiques agricoles plus durables (agriculture biologique, de conservation…).
*Rapport « Emploi et questions sociales dans le monde 2018 : Une économie verte et créatrice d’emploi », mai 2018, OIT/ILO
*A noter : Le CGDD reconnaît que l’activité des éco-activités reste sous-estimée, le suivi statistique ne comptabilisant que partiellement les services d’études et de conseils de même que certains produits adaptés. Un nouveau périmètre plus en phase avec celui d’Eurostat devrait être publié en 2019.