Loi AGEC – Ce qui change dans la lutte contre le gaspillage en 2024

En 2020, la France produisait 315 millions de tonnes de déchets, selon l’Ademe. 213 millions d’entre eux provenaient de la construction et 11 millions étant des déchets dangereux. Toutefois, si l’on enregistre une baisse de 8 % par rapport à 2018 (340 millions de tonnes), celle-ci ne s’expliquerait que par une diminution des activités économiques durant la crise sanitaire, d’après les experts.

Face à l’urgence écologique, les entreprises et les industries doivent impérativement repenser leur mode de consommation et de production. L’année dernière, nous faisions un point sur la loi AGEC. Pour rappel, cette loi vise le passage d’une économie linéaire (produire, consommer, jeter) à une économie circulaire d’ici à 2040. Elle fixe des objectifs ambitieux liés à la gestion des déchets et encourage par-là l’écoconception. Depuis cette date, de nouvelles mesures ont vu le jour. Nous en faisons un tour d’horizon dans cet article.

Rappel : loi AGEC, les grandes lignes

Promulguée le 10 février 2020, la loi anti gaspillage pour une économie circulaire ou loi AGEC met en œuvre une stratégie nationale pour la réduction, le réemploi et le recyclage, également appelée stratégie des 3R.  Elle pousse ainsi à repenser les modèles de production, notamment, en invitant les fabricants à anticiper la fin de vie des produits qu’ils mettent sur le marché. Elle prévoit des mesures qui s’articulent autour de cinq grands axes.

1 – Sortir du plastique jetable

La loi AGEC vise d’abord la fin de la mise sur le marché des plastiques à usage unique d’ici 2040. Elle interdit ainsi progressivement l’usage de certains produits (assiettes, gobelets, pailles, couverts, cotons-tiges, confettis, etc.) et fixe un premier objectif à atteindre d’ici 2025 :

  • Une réduction de 20 % des emballages plastiques à usage unique, avec au minimum la moitié obtenue par recours au réemploi et à la réutilisation.
  • Tendre vers une réduction de 100 % des emballages à usage unique dits « inutiles » (blisters de piles et ampoules, par exemple).
  • Tendre vers 100 % de recyclage de ces emballages pour encourager la mise sur le marché d’emballages recyclables qui ne comportent pas de substances limitant le cycle d’une économie circulaire.

Le nombre de bouteilles en plastique à usage unique devra quant à lui être réduit de 50 % d’ici à 2030.

Depuis le 1er janvier 2023, la loi anti gaspillage interdit par ailleurs aux établissements de restauration rapide (fast-food, restaurants collectifs et scolaires, cafétérias des musées, etc.) servant plus de 20 couverts simultanément d’avoir recours à la vaisselle jetable pour les repas consommés sur place.

Au 1er juillet de cette même année, les emballages de fruits et légumes conditionnés par lots de moins de 1,5 kg étaient également bannis, sauf exceptions prévues par le décret n° 2023-478 du 20 juin 2023.

2- Mieux informer les consommateurs

Pour encourager la transition vers une économie circulaire, la loi AGEC souhaite insuffler un changement de comportement chez les consommateurs, reposant notamment sur une meilleure information de ces derniers qui pourront dès lors se tourner vers des produits plus durables ou mieux trier.

Pour cela, le logo unique Triman doit désormais figurer sur les emballages des produits recyclables afin d’en simplifier l’identification et le dépôt dans le bac jaune ou dans un point de collecte (magasin ou déchetterie).

La loi impose également l’affichage d’un indice de réparabilité sur 9 catégories de produits (smartphone, ordinateur portable, lave-linge hublot et top, tondeuse à gazon, téléviseur, lave-vaisselle, aspirateur, nettoyeur haute pression), des caractéristiques environnementales du produit et des informations sur ceux contenant des perturbateurs endocriniens. Ces informations doivent être mises en ligne sur internet, en accès totalement public et libre de droits (open data).

3- Lutter contre le gaspillage et pour le réemploi solidaire

La loi anti gaspillage interdit l’élimination des invendus non alimentaire. Les entreprises doivent ainsi les valoriser en les donnant à des associations ou en les recyclant. Dans les secteurs de la distribution et de la restauration collective, notamment, le gaspillage alimentaire devra être réduit de 50 % par rapport à 2015 et d’ici 2025. D’ici à 2030 en ce qui concerne le secteur de la restauration commerciale.

Initialement prévue pour le 1er janvier 2023, la fin de l’impression systématique des tickets de caisse avait été reportée au 1er avril pour finalement prendre effet le 1er août. Il se fait désormais à la demande pour les petits achats du quotidien.

4- Agir contre l’obsolescence programmée

En France, ce sont 40 millions de biens qui tombent en panne et sont finalement éliminés. En cause, des appareils non réparables et dont, bien souvent, l’obsolescence est programmée. Afin de réduire l’extraction de matière première et la production de déchets, tout en améliorant le pouvoir d’achat des consommateurs, la loi AGEC vise donc à allonger la durée de vie des produits. Il s’agit ici notamment de favoriser la réparation et le réemploi. C’est en ce sens que la loi AGEC impose l’affichage de l’indice de réparabilité des équipements électroniques et électriques.

5- Mieux produire

Selon le principe « pollueur-payeur », la loi AGEC renforce également la responsabilité élargie du producteur (REP) en lui imposant de financer la collecte, le traitement et la valorisation des déchets issus de ses produits, via les éco-organismes. À la douzaine de filières REP déjà existantes avant la loi (médicaments, équipements électriques et électroniques, textiles, éléments d’ameublement, piles et accumulateurs, certains produits chimiques, etc.) ont été ajoutées de nouvelles filières :

  • En 2021 et 2022: les produits du tabac, jouets, articles de sport et de loisir, de bricolage et de jardin, huiles minérales et synthétiques.
  • En 2023: les matériaux de construction du bâtiment et les voitures, camionnettes, véhicules à moteur à 2 ou 3 roues et quadricycles à moteur.

Ces produits sont en partie collectés par les éco-organismes dans des bornes en magasin afin d’être réparés et remis en état grâce à des fonds de financement du réemploi, notamment.

En cas de non-respect de ces obligations, des sanctions sont appliquées (article L. 541-9-5 du code de l’environnement).

Un regard vers l’avenir : les nouvelles mesures en cours et à venir

Depuis le début de l’année 2024, de nouvelles mesures se sont ajoutées aux précédentes :

Depuis le 1er janvier 2022, la loi AGEC interdit la destruction des invendus non alimentaires. Toutefois, seuls les produits relevant d’une filière à responsabilité élargie des producteurs comme les produits électriques et électroniques, piles, textiles ou produits d’hygiène et de puériculture étaient concernés. Depuis le 1er janvier 2024, l’interdiction s’applique à l’ensemble des produits invendus non alimentaires.

Avec le récent décret n° 2024-134 du 21 février 2024, les catégories de produits et proportions minimales de biens issus du réemploi, de la réutilisation ou intégrant des matières recyclées ont évoluées.

  • On peut noter, par exemple que  20 % du matériel informatique et de téléphonie devront être reconditionnés et 20 % intégrer des matières recyclées, par an.
  • 5 % des articles et équipements sportifs devront être de seconde main et 20 % intégrer des matières recyclées, par an.

La REP a été étendue à 3 autres filières : les textiles sanitaires à usage unique, dont les lingettes pré-imbibées, les pneumatiques et les emballages professionnels de la restauration. Elle devrait concerner prochainement la filière des gommes à mâcher synthétiques non biodégradables.

Depuis le 1er janvier 2024, les communes sont tenues de mettre en place un tri à la source des biodéchets pour les particuliers dans le cadre du service public de gestion des déchets.

Changements prévu pour 2025

Dès le 1er janvier 2025, les lave-linges neufs mis sur le marché devront être équipés de filtres à microfibres plastiques afin de préserver les océans des rejets de microplastiques qui représenteraient 15 % à 31 % des 9,5 millions de tonnes de plastiques déversés chaque année dans le milieu, selon le rapport de 2017 de l’IUCN).

Dans le courant de la même année, La REP sera étendue aux engins de pêche contenant du plastique et aux emballages industriels et commerciaux. L’indice de durabilité remplacera l’indice de réparabilité pour certains produits électroniques, à commencer par les téléviseurs et les lave-linges. Il prendra en compte, en plus de leur facilité à être réparé, le critère de la fiabilité (résistance à l’usure, facilité de maintenance et d’entretien, garantie commerciale et processus de qualité). Les poubelles de tri seront enfin déployées dans l’espace public (parcs, rues, places, etc.).

Prévu en 2026

Au 1er janvier 2026, les produits cosmétiques rincés contenant des microplastiques, comme les shampoings, produits de coloration, gels douche ou démaquillants, seront interdits à la vente.

La loi envisage également de soutenir les entreprises vertueuses qui fabriquent des textiles durables, notamment à partir de matières recyclées. La valorisation des biodéchets en biogaz devra également se généraliser. Enfin, des bonus-malus sur la contribution qu’ils verseront à leur éco-organisme, inciteront les fabricants à écoconcevoir et rendre leurs produits plus durables et recyclables : le montant de cette contribution sera réduit si le produit intègre des critères environnementaux (bonus) ou augmenté s’il est très polluant (malus).

Loi AGEC : entreprises et industries doivent désormais engager et anticiper le changement

La loi AGEC marque le début d’une politique sur l’économie circulaire qui vise à mettre fin à toute forme de gaspillage afin de préserver les ressources et de réduire les émissions de gaz à effet de serre. Depuis qu’elle a été promulguée en 2020 et pour que la France puisse atteindre ses objectifs d’économie circulaire, de nouvelles mesures voient régulièrement le jour.

Pour les entreprises et industries, cela implique de modifier en profondeur leurs modes de consommation et de production, notamment en termes de gestion responsable et durable des déchets, mais également en termes d’innovation et de compétitivité, à travers l’écoconception par exemple.

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