Permettant de donner un nouvel usage à des zones délaissées et d’améliorer la qualité de sols dégradés tout en maîtrisant les risques des futurs usagers, la reconversion de friches connaît un véritable regain d’intérêt. Car au-delà des opérations destinées à des usages classiques de renouvellement urbain comme le logement, les activités économiques ou les équipements publics, les projets portent aussi – et de plus en plus – sur des usages dits « alternatifs » tels que la production d’énergies renouvelables, la création d’entrepôts ou les opérations de renaturation. Les évolutions portent à la fois sur la législation, la réglementation et la normalisation. En voici les principales.

 

Une mise à jour des textes méthodologiques

Après dix ans de mise en application, les textes méthodologiques de la gestion des sites et sols pollués ont été mis à jour par la DGPR début 2017 (cf. note du 19 04 2017). Ce texte introduit la notion de Plan de conception des travaux (PCT) et prend en compte les évolutions apportées par la loi ALUR de 2014 (v. encadré). L’ensemble de ces évolutions a donné lieu à une révision de la norme NF X31-620 en décembre 2018 et a amené à l’arrêté « Certification SSP » du 19 12 2018 précisant les modalités de la certification et le modèle d’attestation.

 

Quoi de neuf avec la loi ALUR ?


Dans son article 173, la loi ALUR a prévu la création de secteurs d’information sur les sols qui comprennent les terrains où la connaissance de la pollution des sols justifie, notamment en cas de changement d’usage, la réalisation d’études de sols et de mesures de gestion de la pollution pour préserver la sécurité, la santé ou la santé publiques et l’environnement ». Ces « SIS » sont « annexés au PLU ou au document d’urbanisme en tenant lieu ou à la carte communale ». A ce jour, 2 700 SIS sont arrêtés, 2 467 sont en consultation et 1725 sont en instruction, selon la DGPR. La loi ALUR introduit également la notion de tiers demandeur qui désigne tout tiers intéressé de se substituer à l’exploitant d’un site où une ICPE a été mise à l’arrêt pour réaliser les travaux de réhabilitation en fonction de l’usage qu’il envisage pour le terrain concerné.

 

Protéger la ressource sols

Parallèlement à cela, les sols sont concernés, en tant que ressources, par la loi « TECV » relative à la transition énergétique pour la croissance verte d’août 2015 et par le projet de loi anti-gaspillage pour une économie circulaire adopté le 21 janvier dernier. Ils sont également concernés par le Plan Biodiversité de juillet 2018 qui a, entre autres, mis en avant l’objectif « Zéro artificialisation nette des sols ». Selon une modélisation de France Stratégie, atteindre cet objectif dès 2030 suppose de réduire de 70% l’artificialisation brute et de renaturer quelques 5 500 ha de terres artificialisées par an.

 

 

Prendre en compte la qualité des sols

Dans un projet de reconversion, il peut y avoir un écart important entre les résultats des études de sols et la réalité des travaux. Une bonne anticipation de la gestion des sols (avec, en particulier, une caractérisation plus poussée) permet de donner le choix, par exemple, entre un traitement sur place sans excavation et un traitement après excavation avec possibilité de valoriser les terres sur le site même ou sur un autre site. Dans le cas contraire, les possibilités de choix sont beaucoup plus limitées du fait de la pression du temps.

 

La valorisation des terres excavées

Sujet fondamental dans le domaine des SSP, la valorisation des terres excavées est plus que jamais au cœur de l’actualité. En effet, avec le déploiement de projets d’envergure comme le Grand Paris Express ou les JO de 2024, la production de déblais va augmenter de manière considérable. Par exemple, les travaux souterrains du Grand Paris Express devraient à eux-seuls générer 43 Mt de déblais dont une proportion importante de terres non inertes. Quand elles sont valorisées, les terres partent en aménagement, en techniques routières, en briques ou en remblayage de carrières. Mais les professionnels se heurtent à l’épineuse question de la sortie du statut de déchet de ces terres excavées. Face à cela, les autorités ont élaboré un projet d’arrêté(1) qui a été mis en consultation jusqu’à juin dernier (v. encadré). Resté en stand-by depuis du fait des évolutions apportées par le projet de loi Economie circulaire (en particulier sur la question de la traçabilité), cet arrêté devrait être adopté d’ici la fin du premier semestre. En parallèle, de nouveaux guides référentiels sur la valorisation des terres excavées devraient être bientôt publiés, l’un destiné aux projets d’aménagement en complément de celui déjà existant(2) et les deux autres, axés sur la valorisation en techniques routières.

 

 

Arrêté « Sortie de statut de déchet »


Le projet d’arrêté définit trois critères fondamentaux pour que des terres excavées ou sédiments « qui ont fait l’objet d’une préparation en vue d’une utilisation en génie civil ou en aménagement cessent d’être des déchets ». Il faut d’une part que les déchets entrants aient satisfait à deux types de critères précisés en annexe 1 (terres, cailloux et boues de dragage relevant de 5 codes déchets spécifiques et questions liées au site receveur) et que la personne réalisant la préparation ait conclu un contrat de cession avec le tiers qui valorisera les terres excavées et sédiments.

 

On le voit, la reconversion de friches constitue un enjeu majeur pour l’aménagement des territoires au sens où elle concerne à la fois la maîtrise de l’étalement urbain, l’usage des sols, la question du sol en tant que ressource et les grands enjeux comme l’artificialisation, l’adaptation au changement climatique, la préservation des ressources et la biodiversité.

La question est prise à bras le corps par le MTES qui a lancé en juin 2019 un groupe de travail dédié pour « échanger sur les moyens d’accélérer » et a fait de la réhabilitation des friches pour lutter contre l’artificialisation des sols un des grands axes du Conseil de défense écologique. Dans ce cadre, le gouvernement « a acté cinq projets concrets pour en faire les pilotes d’une démarche plus globale qui sera finalisée avec tous les acteurs concernés d’ici au printemps prochain ».

De son côté, l’Ademe, qui a déjà soutenu près de 130 projets depuis 2010, a lancé en novembre une nouvelle édition de son Appel à projets « Travaux de dépollution pour la reconversion de friches polluées ». Les opérations exemplaires attendues seront appréciées selon trois conditions : dépollution in situ ou sur site, conception intégrée et cohérence territoriale. La date limite de dépôt des dossiers est fixée au 2 avril 2020 (www.ademe.fr).

 

 

1)Projet d’arrêté fixant les critères de sortie de statut de déchets pour les terres excavées et sédiments ayant fait l’objet d’une préparation en vue d’une utilisation en génie civil ou aménagement.

2)Guide de valorisation hors site des terres excavées issues de sites et sols potentiellement pollués dans les projets d’aménagement (BRGM, Ineris, MTES). Les deux guides sur la valorisation en techniques routières sont réalisés par le Cerema.

En savoir plus : Le 23 janvier dernier, l’Afite organisait le colloque Etat des lieux de la reconversion des sites pollués et perspectives, l’occasion de faire le point à la fois sur les avancées législatives et réglementaires et de présenter de nouveaux outils et divers retours d’expérience autour de nombreux experts et acteurs du domaine (www.afite.org).

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