Qu’il s’agisse de robots de surface ou sous-marins, opérés à distance ou autonomes, les engins flottants connaissent un véritable essor. Face à cela, il devenait nécessaire de faire évoluer le code des transports et le code des douanes. C’est ce qu’a proposé le ministère de la Mer dans une ordonnance spécifique présentée en octobre. La France est ainsi devenue l’un des premiers Etats à introduire la notion de drone maritime et de navire autonome dans son corpus juridique et à en préciser les conditions d’exploitation.
Pour mémoire, le Cluster Maritime Français, qui a mis en place un groupe de travail dédié dès 2015, avait publié en juin 2020 le « Guide des bonnes pratiques relatives aux drones maritimes » fixant les recommandations pour la conception, la fabrication, la commercialisation, la mise en œuvre, l’usage, la maintenance et les opérations des drones en mer. Ce guide avait vocation à « inspirer le législateur », comme précisé dans son préambule. Il était en particulier « destiné à compléter le règlement sur la sécurité des navires de la Direction des Affaires Maritimes, notamment sans exhaustivité les Divisions 222 et 233 ainsi que l’article 135 de la loi d’Orientation des mobilités ».
Une adaptation de la définition du navire
L’ordonnance n° 2021-1330 du 13 octobre relative aux conditions de navigation des navires autonomes et des drones maritimes modifie des dispositions du code des transports et le code des douanes de manière à lever les obstacles à la navigation et l’exploitation d’engins flottants autonomes ou commandés à distance.
Selon le ministère, « en l’absence de normes internationales encadrant les conditions d’exploitation et précisant les règles de conception applicables aux navires autonomes, elle crée un régime spécifique d’exploitation expérimentale pour ces navires ».
Outre cette prise en compte de l’usage des navires autonomes, une nouvelle catégorie d’engins flottants distincts des navires est créée : les drones maritimes qui recouvrent les petits engins de surface ou sous-marins opérés à distance ou par leur propre système d’exploitation, sans personnel, passager ni fret à bord. Ces engins font l’objet de plusieurs obligations – identification visuelle, immatriculation, pavillon, sans oublier les assurances, le respect des règles de circulation maritime, le régime de responsabilité (cf. sécurité de la navigation maritime et de l’environnement) et les règles générales d’entretien et d’exploitation. Ils restent commandés par un capitaine. Les pilotes de drones maritimes doivent être titulaires d’un titre de conduite en mer et avoir suivi une formation spécifique.
Signé le 17 novembre dernier, le projet de loi ratifiant l’ordonnance entame sa procédure législative auprès du Parlement.
Différents types d’engins
Les engins flottants se répartissent en trois principaux types :
– les robots de surface ou USV (« Unmanned Surface Vehicles ») : drones marins de surface, motorisés et supervisés à distance, principalement destinés à la bathymétrie, l’océanographie, la surveillance et la détection,
– les robots sous-marins ou ROV (« Remotely Operated Vehicles ») : drones sous-marins opérés à distance, pour l’observation / inspection ou pour des interventions,
– les robots autonomes sous-marins ou AUV (« Autonomous Underwater Vehicles »), essentiellement pour la bathymétrie, comme l’Idef ou l’Aster d’Ifremer.
On distingue également les drones sous-marins hybrides (HROV, comme le drone Ariane d’Ifremer), les « gliders » (drones autonomes planeurs de forme hydrodynamique) ou encore les « crawlers » (robots sous-marins avec roues ou chenilles pour étudier le fond marin, voire l’intérieur de canalisations).
Source : Airsub Drone
Quoi de neuf dans le domaine des drones maritimes ?
Au printemps 2021, trois acteurs français : Alcatel Submarine Networks (systèmes de câbles sous-marins), iXblue (équipements de pointe pour l’autonomie, la mer et la photonique) et SeaOwl (services maritimes, notamment basés sur les drones) se sont associés au sein de l’AMSSI : Agora for Maritime & Submarine Sustainable Innovation. L’idée est de mettre en commun les savoir-faire et technologies pour faire aboutir des projets industriels concrets dans les domaines maritimes, sous-marins et de lutte contre le changement climatique. Un projet déjà en cours vise à développer un drone capable d’effectuer des missions de surveillance longues distances. D’autres membres français et européens devraient rejoindre cette initiative collaborative.
Fin octobre, le pôle Mer Méditerranée a labellisé le projet de recherche PyCharge destiné à développer une solution de rechargement en mer pour AUVs utilisant l’énergie des courants marins. En effet, les robots autonomes sous-marins actuels voient leurs missions limitées par la faible autonomie de leur batterie et par leur temps de rechargement, celui-ci se faisant à quai ou à bord d’un navire. Installer des bornes de rechargement en mer permettrait aux drones sous-marins de gagner en autonomie et de prolonger leurs missions. Ce projet européen est mené par trois partenaires industriels qui apportent chacun leur expertise : Pytheas Technology utilise la piézo-électricité pour la modélisation et la conception, Feac Engineering s’occupe de l’optimisation du design et des simulations et Notilo Plus qualifie les besoins et réalise les études de prototypes. Le projet est financé par Galatea – Blue Growth Accelerator porté par le pôle Mer Méditerranée et par Bpi Deeptech.
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