L’étude des liens entre santé et environnement n’est pas nouvelle. Mais ce n’est qu’en 1989, lors de la toute première Conférence ministérielle sur l’environnement et la santé à Francfort, qu’une définition de la thématique santé-environnement a été proposée par l’OMS. Trente ans après, où en est-on dans ce domaine éminemment transversal ?

Selon l’OMS, « la santé-environnement concerne les aspects de la santé humaine et du bien-être déterminés par des facteurs environnementaux (effets directs des agents chimiques, radiatifs et biologiques, effets souvent indirects de l’environnement physique, social, psychosocial et esthétique), ainsi que les politiques de connaissance et de maîtrise des facteurs ayant des effets potentiels. Elle concerne également la politique et les pratiques de gestion, de résorption, de contrôle et de prévention des facteurs environnementaux susceptibles d’affecter la santé des générations actuelles et futures ». En France, le 2e Plan national Santé-Environnement (PNSE2 2009-2013) désignait, sous la thématique santé-environnement, « les aspects de la santé humaine qui sont influencés par l’environnement et notamment par les pollutions environnementales ».

Pendant longtemps, les questions de santé-environnement sont restées cantonnées aux pollutions chimiques que l’on pouvait retrouver dans l’eau, l’air, les sols, les déchets, l’alimentation (via les pesticides, les polluants industriels, les produits de consommation, les traitements médicaux…) auxquelles étaient ajoutés certains agents physiques (radiations, champs électromagnétiques, rayonnements UV, bruit) et biologiques (pollens et autres substances allergisantes, nuisibles, parasites ou autres vecteurs de maladies). Les polluants étaient, le plus souvent, étudiés indépendamment les uns des autres. Puis la question cruciale des mélanges de substances est apparue (« effets cocktail ») de même que celles des faibles doses et des temps d’exposition.

Un nouveau concept : l’exposome

Aujourd’hui, la tendance est à l’étude de l’ensemble des facteurs environnementaux auxquels un individu est exposé tout au long de sa vie, de sa conception à sa mort(1). C’est tout l’objet du concept d’exposome créé dès 2005 mais qui prend sa valeur depuis peu (ex. : le PNSE3 y fait référence). Ces facteurs environnementaux comptent bien sûr les pollutions mais ils vont bien au-delà. Ils recouvrent ainsi les substances chimiques, les agents physiques mais aussi les modes de vie et comportements et les influences culturelles et sociales. Sont également pris en compte les effets sur la santé des événements météorologiques extrêmes (canicules, fortes chaleurs, froid).

Personne manipulant des produits dangereux

 

Une thématique transverse

La thématique santé-environnement se situe au cœur d’enjeux intersectoriels nationaux et internationaux. Outre les travaux de l’OMS, l’Europe s’est dotée en 1989 d’une Charte de l’environnement et de la santé selon laquelle « chaque personne est en droit de bénéficier d’un environnement permettant la réalisation du niveau le plus élevé possible de santé et de bien-être, d’être informée et consultée sur les actions susceptibles d’affecter l’environnement et la santé, et de participer au processus de prise de décision ».

De son côté, la France travaille à la quatrième édition de son PNSE (v. encadré) et est en train de revoir sa stratégie nationale sur les perturbateurs endocriniens. D’autres plans sont déjà en place comme le plan Ecophyto, le plan Chlordécone, le plan Gestion du risque radon, le plan d’action interministériel Amiante, etc. Rappelons que l’IGAS et le CGEDD(2) avaient rendu fin 2018 un rapport relativement sévère sur le PNSE3 constatant notamment l’absence d’impact sanitaire positif mesurable de ce plan. De fait, malgré une inflation du nombre de mesures listées (110 vs 58 pour le PNSE2), une seule d’entre elles visait à réduire l’exposition aux facteurs nocifs à part celle sur la protection des captages (deux si l’on compte celle visant à faire disparaître 100% des points noirs de bruit). En parallèle, les deux institutions ont pointé la nécessité de bien articuler l’ensemble des différents plans entre eux.

 

Les grands axes du futur PNSE4


Mieux connaître les expositions et les effets de l’environnement sur la santé des populations

Objectif : mieux comprendre et agir sur la survenue des maladies chroniques et la possibilité pour chacun d’évoluer dans un environnement favorable à sa santé

Informer, communiquer et former les professionnels et les citoyens 

Objectif : garantir une information de chacun des citoyens et la formation de l’ensemble des professionnels concernés, en utilisant des technologies numériques innovantes et en s’appuyant notamment sur les dispositifs et structures de formation existants

Réduire les expositions environnementales affectant notre santé 

La réduction de ces expositions est « une priorité permanente, compte tenu du nombre important et croissant de pathologies induites par la dégradation de l’environnement dans lequel nous évoluons au quotidien ». Le PNSE4 devrait mettre l’accent sur la qualité de l’air intérieur « au vu des attentes sociétales concernant cet enjeu ».

Démultiplier les actions concrètes menées dans les territoires 

Par leurs compétences et étant en prise directe avec le quotidien des Français, les collectivités locales disposent de leviers d’actions pour réduire l’exposition des populations, en prenant en compte notamment les inégalités. Une plate-forme collaborative territoire-environnement-sante.fr a été lancée cette année pour permettre aux acteurs impliqués de valoriser et partager leurs projets et actions dans le domaine. Et un 2e AMI « Territoire engagé pour mon environnement, ma santé » est en cours jusqu’au 13 décembre.

 

Comment les entreprises intègrent les enjeux de santé-environnement ?

C’est tout l’objet de la nouvelle publication lancée par l’association Entreprises pour l’Environnement (EPE) après plusieurs années de travail. A travers divers exemples de solutions ou initiatives mises en œuvre par plusieurs de ses membres, elle introduit les enjeux (répondre aux attentes sociétales croissantes ; éviter les ruptures de l’activité et les risques de crise, créer des opportunités, anticiper et suivre l’évolution du droit) et revient sur les principales notions. Plusieurs experts externes ont également été associés à la réalisation de ce document (3).

Des avancées considérables en termes de recherche et de technologie

Tout évolue en fonction de l’évolution même de l’état des connaissances. Ainsi, par exemple, la Commission européenne a chargé l’EFSA (4) fin 2018 de réévaluer les risques posés par les PFAS pour la santé humaine sur la base de nouvelles données obtenues depuis l’évaluation initiale menée en 2008.

Réduire les expositions environnementales, l’objectif principal de la santé-environnement, passe avant tout par la prévention. A titre d’exemple, lorsqu’un produit de substitution est envisagé pour telle ou telle substance, il est fondamental de s’assurer de sa non-nocivité avant de l’intégrer dans un process ou un produit. Cela passe également par la mesure qui n’est utile que si elle débouche sur des actions curatives concrètes. Dans ce domaine, les avancées technologiques sont considérables, en particulier grâce à l’intégration du numérique : les analyses se font toujours plus fines, plus rapides et plus précises.

 

Quels types de polluants ?


Outre les polluants ou contaminants déjà connus depuis longtemps (amiante, arsenic, benzène, cadmium, chrome, dioxines et furanes, éthers de glycol, HAP, mercure, métaux, plomb, légionelles…), d’autres font l’objet d’attentions plus récentes. C’est le cas notamment des particules ultrafines (PM0,1), du 1,3 butadiène (un COV), du carbone suie pour l’air*, des stéroïdes, médicaments, désinfectants, phtalates, retardateurs de flammes et antioxydants pour l’eau, des substances perfluoroalkylées (PFAS) pour les sols mais aussi des LEDs bleus ou encore des bisphénols A, B et S

*Tous trois identifiés par l’ANSES dans son Avis de juin 2018 : « Polluants émergents dans l’air ambiant ».

**L’EFSA (European Food Safety Authority) est en charge de réévaluer les risques posés par les PFAS pour la santé humaine sur la base de nouvelles données.

 

1) Les périodes de vulnérabilité étant surtout la grossesse et la petite enfance.

2) IGAS : Inspection générale des affaires sociales – CGEDD : Conseil général de l’environnement et du développement durable.

3) « Intégration des enjeux de santé environnementale par les entreprises », EPE, Octobre 2019.

4) EFSA : European Food Safety Authority. Les PFAS sont deux contaminants chimiques auxquels les êtres humains sont exposés (souvent en mélange) via la chaîne alimentaire.

 

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