Que fait l’industrie textile en matière d’environnement ?

L’industrie textile en France, c’est 2 150 entreprises (filature, tissage, ennoblissement…), dont 1300 de moins de 10 salariés. En 2017, elle a réalisé un CA de 13,4 mrd d’euros (+ 1,8% par rapport à 2016) avec 60 350 salariés. Elle travaille à partir de trois types de ressources : les fibres naturelles (coton, laine…), les fibres artificielles (viscose, un dérivé de cellulose de bois obtenu après un process chimique) et les fibres synthétiques dérivées du pétrole (polyester, acrylique…).

Une empreinte écologique importante

Comme toute industrie, l’industrie textile a différents impacts : changement climatique, eutrophisation des eaux douces, épuisement des ressources minérales et fossiles, effets respiratoires, consommation d’énergie. L’Ademe a d’ailleurs identifié les phases du cycle de vie les plus contributrices des articles d’habillement pour chacun de ces aspects dans une étude rendue publique en septembre 2018*, chaque phase (production des matières premières, mise en forme, transport, utilisation…) ayant des impacts spécifiques (ex. : utilisation d’engrais pour la production, procédés de teinture, consommations d’eau, d’électricité et de vapeur, utilisation de détergents…).

  • S’agissant du changement climatique, un rapport de la Fondation Ellen MacArthur montrait en novembre 2017 que l’industrie textile émet plus de CO2 que les transports commerciaux aériens et maritimes réunis, avec 1,2 mrd de teq CO2 émises en 2015.
  • S’agissant des substances chimiques utilisées, la campagne Detox lancée en 2011 par Greenpeace commence à avoir des effets, en parallèle avec les évolutions réglementaires de type Reach. Par exemple, les marques engagées travaillent sur l’élimination de onze groupes prioritaires de substances. Et 72% des marques signataires déclarent avoir réussi à éliminer les substances per- et poly-fluorées (PFCs). Par ailleurs, l’Agence suédoise des produits chimiques (KemI) et l’Agence française ANSES viennent d’élaborer une proposition conjointe visant à interdire plus d’un millier de substances allergènes dans les vêtements et chaussures en Europe. La proposition a été soumise à l’ECHA, agence européenne des produits chimiques, qui la met en consultation pendant six mois.

Vers une économie circulaire du textile ?

Dans son contrat stratégique de filière signé en janvier pour 2019-2022, le CSF Mode et Luxe souhaite notamment impulser une dynamique vertueuse d’économie circulaire. Plusieurs axes de réflexion sont ainsi engagés dans les domaines de la traçabilité, du recyclage et des nouvelles matières et matières durables. Car aujourd’hui, à l’échelle mondiale, seulement 1% des tissus sont recyclés et réutilisés pour en faire de nouveaux. En France, la filière REP pour le textile d’habillement, le linge de maison et les chaussures a été mise en place fin 2008 (« Eco-TLC »). Selon l’éco-organisme, sur 624 000 tonnes de TLC mises sur le marché, 223 000 ont été collectées dont 184 494 triées et valorisées dans les 60 centres de tri conventionnés. 58,5% des TLC triés sont destinés à la réutilisation et 41,2%, au recyclage et à la valorisation énergétique. Rappelons que la Directive Déchets de 2008 qui impose au moins 50% de recyclage/réemploi des déchets ménagers pour différents matériaux dont les textiles entre en vigueur le 1er janvier 2020 et que les Etats membres vont devoir mettre en place d’ici 2025 deux collectes séparées supplémentaires, l’une pour les textiles, l’autre pour les déchets dangereux.

Il importe donc de créer une véritable stratégie nationale de recyclage pour la filière mode et luxe. Ceci passe par le développement de solutions technologiques performantes (tri optique, robots…) qui permettent de transformer, à un coût économique supportable, les déchets textiles et cuir en ressources. Et cela passe aussi par une massification des collectes de gisements qualifiés et une valorisation des matières recyclées. Bref, écoconception, optimisation des procédés, recherche de débouchés et création de valeur pour les articles en fin de vie ou invendus tendent à devenir les maîtres-mots de la filière textile.

 

Le lin : un atout gagnant européen


« Vertueux » par nature (il protège les sols, ne nécessite pas d’arrosage et ne génère pas de déchets car toute la plante est utilisée), le lin offre des perspectives intéressantes. Il permet une agriculture de proximité employant une main d’œuvre importante non délocalisable. Le lin s’inscrit pleinement dans la tendance à maîtriser et diffuser l’usage de fibres textiles biosourcées et recyclables.

 

L’innovation, la voie de salut

Tissu dépolluant - Anemotech

Tissu dépolluant basé sur le mouvement de l’air

Longtemps considérée comme traditionnelle, la filière textile fait aujourd’hui une large place à l’innovation. En témoignent des instituts comme le CETI (Centre européen des textiles innovants) ou l’IFTH (Institut français du textile et de l’habillement) ou encore les pôles de compétitivité Techtera, Fibres-Energivie et Up-Tex qui devrait fusionner avec Innotex et Matikem en juillet prochain pour former EuraMaterials. Parmi les innovations, les textiles techniques occupent une place de choix. Ils peuvent avoir des propriétés anti-feu, anti-UV, être autonettoyants, isolants ou encore avoir une conductivité électrique. De même, les textiles se font intelligents via l’exploitation des opportunités offertes par le numérique). Dans le cadre de la « Nouvelle France Industrielle », le Plan « Textiles techniques et intelligents » a déjà retenu sept projets dont Lightex (première usine dédiée aux ‘smart textiles’ avec fibre optique lumineuse) et Autonotex (textiles connectés autonomes en énergie).

Pollutec 2018 a même été l’occasion de présenter un tissu dépolluant basé sur le mouvement de l’air proposé par l’Italien Anemotech. En parallèle, le concept d’usine textile du futur se concrétise avec de nouvelles technologies d’ennoblissement et d’assemblage ou l’utilisation toujours plus poussée des outils numériques.

 

Deux démonstrateurs de valorisation


L’industrie textile française se dote de deux démonstrateurs en vue de valoriser les matières collectées. L’un, mécanique, pour traiter les articles 100% coton (dans les Hauts de France) ; l’autre, chimique, permettant de séparer les matières coton et polyester (en Auvergne-Rhône Alpes). Le polyester ainsi récupéré pourrait être utilisé dans des vêtements de sport ou en bagagerie notamment.

 

* Rapport « Modélisation et évaluation des impacts environnementaux de produits de consommation et biens d’équipement », Ademe, Septembre 2018.

 

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