La thalassothermie représente une innovation prometteuse dans le domaine des énergies renouvelables. Contrairement à l’énergie hydrolienne, l’énergie marémotrice ou l’énergie houlomotrice, cette technologie qui tire parti de l’énergie calorifique naturellement stockée par l’eau de mer est sans impact sur l’environnement marin et ne dépend pas des conditions marines, l’eau de mer étant à température quasi constante tout au long de l’année.
À l’heure où la transition énergétique est devenue une nécessité dans la lutte contre le changement climatique, la thalassothermie offre donc une alternative écologique et durable aux sources d’énergie fossiles pour alimenter un système de chauffage et de climatisation. Un avantage non négligeable pour la France métropolitaine qui dispose de 5 500 km de littoral.
Fonctionnement de la thalassothermie
Comme la géothermie, la thalassothermie (du grec thalasso « mer » et thermos « chaleur ») repose sur le principe de récupération de l’énergie calorifique et sa transformation en énergie réutilisable par les réseaux de chaleur ou de climatisation. La différence réside cependant dans le fait qu’elle n’utilise pas l’énergie se trouvant dans le sol, mais celle provenant de l’eau de mer.
Tout au long de l’année, l’eau de mer est en effet naturellement chauffée par le soleil à une température quasi constante (entre 12 et 25 °C), en surface et à faible profondeur. C’est cette eau tempérée qui est captée dans la mer à une profondeur de 5 à 10 mètres. Celle-ci circule ensuite dans des échangeurs thermiques permettant de transférer les calories du circuit d’eau de mer vers le circuit d’eau douce qui alimente les pompes à chaleur.
Dans ces échangeurs thermiques, la boucle d’eau de mer et la boucle d’eau douce sont séparées par une fine paroi leur permettant de ne pas se mélanger. L’eau de mer est ainsi restituée à son milieu naturel, sans modification majeure et sans risque pour la faune et la flore. De l’autre côté, l’eau douce est acheminée jusqu’aux pompes à chaleur qui n’ont alors que peu d’énergie à consommer pour lui permettre d’atteindre la température souhaitée.
Quelles applications et quels avantages de la thalassothermie ?
La thalassothermie offre une solution durable et efficace pour le chauffage et la climatisation des bâtiments côtiers. En hiver, la boucle d’eau de mer tempérée permet de réchauffer la boucle d’eau douce et ainsi d’alimenter les bâtiments en chauffage. En été, le processus est inversé, utilisant la boucle d’eau de mer pour refroidir l’eau douce et rafraîchir les espaces. Le système permet également de fournir l’eau chaude sanitaire.
En France, le système de chauffage et de climatisation dominant est encore basé sur les énergies fossiles. En utilisant une source d’énergie renouvelable, telle que l’eau de mer, la thalassothermie permet d’améliorer la performance environnementale des bâtiments. Cette réduction des émissions de gaz à effet de serre est essentielle dans la lutte contre le changement climatique ainsi que pour atteindre les objectifs de transition énergétique de la France et de l’Europe.
Thalassothermie : l’exemple de l’écoquartier Smartseille
Conçu et réalisé par Dalkia Smart Building, une filiale de Dalkia (Groupe EDF), Massiléo est un réseau énergétique qui utilise la thalassothermie pour fournir en eau chaude sanitaire, chauffage et climatisation les 58 000 m2 de bâtiments (des bureaux, commerces, logements et un hôtel) de l’écoquartier Smartseille de la ville de Marseille.
L’installation est composée d’une boucle d’eau tempérée reliant l’échangeur thermique aux pompes à chaleur se trouvant au sous-sol des bâtiments, des thermofrigopompes qui permettent de produire simultanément chauffage, climatisation et eau chaude sanitaire. Afin d’optimiser plus encore l’efficacité du réseau, les échangeurs thermiques sont revêtus de titane pour éviter la corrosion due à l’eau de mer. Les bâtiments échangent par ailleurs leurs calories en récupérant l’énergie fatale, l’énergie résiduelle produite lors du processus. Ainsi par exemple, la chaleur que dégage la climatisation des bureaux est récupérée pour produire l’eau chaude des logements, et inversement.
Ce réseau énergétique, d’une capacité de 21 MW de production de chaud et de froid, alimente de cette manière 100 % des besoins de l’écoquartier avec une énergie à 75 % renouvelable et locale. Il permet de réduire la production de CO2 de 80 % par rapport à une solution traditionnelle.
La Thalassothermie, des perspectives d’avenir prometteuses
La thalassothermie représente une avancée significative dans le domaine des énergies renouvelables et de la transition énergétique. En exploitant l’énergie thermique de l’eau de mer, cette technologie permet de réduire la dépendance aux combustibles fossiles et contribue à réduire les émissions de gaz à effet de serre. Elle offre ainsi une solution durable pour le chauffage et la climatisation des bâtiments. De nombreuses villes côtières, comme Monaco ou Marseille, l’ont bien compris et ont déjà franchi le pas. D’autres réseaux énergétiques sont par ailleurs en cours de développement, notamment dans la ville des Sables-d’Olonne et celle de la Grande-Motte.
Toutefois, la thalassothermie n’en est encore qu’à ses débuts. Les coûts initiaux liés à l’installation du système de captage et d’échange thermique comme les risques de corrosion due à l’eau de mer ou l’impact écologique potentiel d’une installation non adaptée sur les écosystèmes marins ne sont en effet pas négligeables.
Mais si la thalassothermie doit encore surmonter de nombreux défis pour atteindre son plein potentiel, les avancées technologiques, notamment dans les matériaux résistants à la corrosion (à l’image du titane utilisé par Dalkia dans ses conceptions) et l’efficacité des échangeurs thermiques, devraient rapidement rendre cette technologie plus accessible et plus efficace encore. Les aides et subventions, telles que celles attribuées par l’ADEME, et dont a bénéficié Marseille pour son projet Massiléo, vont également en ce sens.