Pour se reproduire, se reposer, se nourrir, migrer ou s’adapter au changement climatique, les espèces animales et végétales, aquatiques et terrestres, doivent pouvoir se déplacer. Mais avec l’urbanisation, la déforestation, la pollution et l’agriculture intensive, les espaces naturels diminuent et se fragmentent, menaçant alors la biodiversité et le bon fonctionnement des écosystèmes dans leur ensemble. Des écosystèmes pourtant indispensables pour satisfaire les besoins humains et améliorer sa résilience face au changement climatique…

La connectivité entre les différents habitats naturels doit donc impérativement être maintenue. Cette nécessaire continuité écologique fait ainsi l’objet de diverses politiques, notamment la Trame verte et bleue et le plan national de restauration de la continuité écologique.

Explications.

De nombreux obstacles à la continuité écologique

Une continuité écologique peut être interrompue par divers obstacles d’origine anthropique : infrastructures de transport (routes, voies ferrées, etc.), barrages hydrauliques ou seuils, milieux dégradés, sols artificialisés, pollution chimique, lumineuse et sonore, etc. Chacun de ces obstacles agit comme une véritable barrière écologique créant une rupture dans la continuité des écosystèmes aquatiques et terrestres et réduisant ou empêchant la libre circulation des espèces animales et végétales. Les conséquences sur la biodiversité peuvent être lourdes : extinction d’espèces, augmentation de la vulnérabilité de ces espèces aux maladies ou au changement climatique, perte de la diversité génétique (en isolant les populations), etc.

Pour une grande majorité d’espèces aquatiques en effet, les lieux de reproduction, d’alimentation et de croissance ne sont pas les mêmes. La présence de barrages, de seuils ou de digues régulant l’écoulement des cours d’eau empêche le libre déplacement des poissons et des organismes comme les algues, phytoplanctons et zooplanctons, diatomées, larves ou invertébrés, en créant des barrières souvent infranchissables.

L’accumulation d’ouvrages à franchir affecte particulièrement la circulation de poissons migrateurs comme le saumon, la truite de mer, l’esturgeon ou l’anguille, pour bon nombre d’entre eux menacés d’extinction, et augmente par ailleurs leur taux de mortalité. Le transport des sédiments nécessaires à la création des habitats ou à l’épuration des eaux est également très impacté.

Il en va de même pour les écosystèmes terrestres avec l’urbanisation, l’artificialisation des sols, la construction d’infrastructures de transport et l’agriculture intensive qui dégradent la qualité des sols, réduisent les espaces naturels et fragmentent également les habitats.

Le saviez-vous ?

En 2020, ce sont plus de 100 000 obstacles à l’écoulement qui ont été recensés en France métropolitaine, par l’Observatoire national de la biodiversité. Soit un obstacle tous les 6 km.

L’essentielle continuité écologique des milieux aquatiques

Outre leur importance vitale pour de nombreuses espèces terrestres qui s’y nourrissent et s’y reproduisent, les milieux aquatiques nous rendent bon nombre de services gratuits (on parle de services écosystémiques) : ils régulent les cycles hydrologiques, réduisent les risques d’inondation, maintiennent l’humidité des sols en période de sécheresse ou garantissent encore la bonne qualité de l’eau en filtrant ou décomposant les substances polluantes.

Or, selon l’UICN, 27% des espèces d’eau douce sont menacées d’extinction au niveau mondial, et en France, seuls 43% des cours d’eau sont en bon état écologique. Il est donc impératif de réhabiliter leur fonctionnement naturel. Si, selon le ministère de la Transition écologique, la suppression des ouvrages serait la meilleure solution pour restaurer cette continuité écologique, celle-ci peut également être améliorée par d’autres moyens :

  • La réduction de la taille de certains ouvrages hydrauliques.
  • La création de brèches.
  • L’installation de dispositif de franchissement par les poissons migrateurs (passes à poissons, rampes, rivière de contournement, etc.).
  • La réhabilitation des lits des rivières et des berges.
  • Des mesures de gestion adaptées comme l’ouverture temporaire des vannes pour favoriser le transport des sédiments, par exemple.
  • Des pratiques agricoles plus respectueuses de l’environnement.

Le Plan national de restauration de la continuité écologique des cours d’eau

Lancé en novembre 2009 dans le cadre de la directive-cadre sur l’eau, le plan national de restauration de la continuité écologique des cours d’eau (Parce) vise à mieux coordonner et créer des synergies entre l’État, l’Office français de la biodiversité (OFB) et les agences de l’eau afin de rétablir les habitats naturels et l’écoulement des cours d’eau, et à améliorer la circulation des poissons, notamment des poissons migrateurs.

Ce plan national repose sur cinq piliers fondamentaux :

  • Le renforcement de la connaissance avec la création du référentiel national des obstacles à l’écoulement comme les seuils et les barrages.
  • La définition des priorités d’intervention par bassin en établissant une stratégie de restauration.
  • La révision des programmes des agences de l’eau et les contrats d’objectifs des établissements publics pour renforcer leurs aides aux actions de restauration de la continuité écologique des cours d’eau.
  • La mise en œuvre d’une police de l’eau en charge des contrôles et instructions, avec la mise en place d’un programme pluriannuel de mise aux normes des ouvrages et d’effacement des ouvrages. Notez que la police de l’eau est composée du service dédié de la Direction départementale des Territoires (DDT), de l’OFB, de la gendarmerie, de la police et des maires.
  • L’évaluation des bénéfices environnementaux des mesures mises en œuvre.

L’Office français de la biodiversité joue un rôle essentiel dans la restauration de la continuité écologique : au niveau territorial, il est chargé de réaliser les contrôles de conformité des ouvrages hydrauliques, en évalue l’impact écologique et apporte un avis technique sur la solution de restauration proposée. Au niveau national, il met en œuvre et/ou finance des programmes de recherche et de développement et pilote le Centre de ressources Cours d’eau qui permet de « capitaliser, partager et diffuser, des guides, des retours d’expérience et des outils de sensibilisation sur la restauration de la continuité écologique » et d’améliorer les pratiques sur cette thématique.

Trame verte et bleue : une politique intégrée

La politique Trame verte et bleue (TVB), située au croisement de la protection de l’environnement et de l’aménagement du territoire, vise à limiter la disparition de la biodiversité résultant de l’artificialisation et de la fragmentation des espaces naturels en restaurant ou en créant des réseaux de continuités écologiques terrestres (verte) et aquatiques (bleue). Depuis peu, la trame noire a également fait son apparition pour prendre en compte la vie nocturne perturbée par la lumière artificielle et rétablir des zones d’obscurité.

Les différentes trames sont identifiées dans les schémas régionaux d’aménagement, de développement durable et d’égalité des territoires (SRADDET) et les schémas régionaux de cohérence écologique (SRCE) pour l’Île-de-France. Elles sont prises en compte à l’échelle locale dans les plans locaux d’urbanisme (PLU), les schémas de cohérence territoriale (SCOT) ou les cartes communales (CC), par exemple. La mise en œuvre de la TVB inclue aussi bien la protection des corridors écologiques existants, que la création de nouvelles continuités et la restauration des habitats dégradés.

Les entreprises, industries et agriculteurs peuvent eux aussi agir pour préserver la continuité écologique et veiller à réduire leur impact sur l’environnement. À ce titre, un nombre grandissant d’exploitants agricoles se lance dans la plantation de haies bocagères et peut être une source d’inspiration.

Pour aller plus loin ou suivre les évolutions sur la politique de continuité écologique, différentes ressources sont disponibles. On peut noter :

  • Le site de l’Office français de la biodiversité
  • Le site du ministère de la Transition écologique
  • Le centre de ressources Trame verte et bleue

Une continuité écologique indispensable, aujourd’hui et demain

Le rétablissement de la continuité écologique représente un enjeu majeur pour préserver la biodiversité, assurer le bon fonctionnement des écosystèmes à long terme et nous faire profiter des services essentiels qu’ils nous rendent.

Face à ces défis, la France s’est dotée de politiques ambitieuses visant à restaurer cette continuité écologique sur l’ensemble du territoire : le plan national de restauration de la continuité écologique des cours d’eau (PARCE) qui vise à restaurer la libre circulation des espèces aquatiques et le transport sédimentaire et la Trame verte et bleue (TVB) dont l’objectif est de créer un véritable réseau écologique fonctionnel, reliant les milieux naturels terrestres et aquatiques à travers des corridors biologiques, notamment.

Maintenir et préserver la continuité écologique est l’affaire de tous et doit permettre de léguer aux générations futures des écosystèmes sains, résilients et interconnectés, garants de la préservation de notre patrimoine naturel ainsi que de nos ressources vitales.

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